Jesé, le crack qui n’a pas voulu attendre

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Jesé devait être le successeur de Cristiano Ronaldo au Real Madrid. A 19 ans, il rêvait tout haut du Ballon d’Or. A 27 ans, l’ailier s’est perdu entre une blessure qui a stoppé son ascension, une vie dissolue et un passage catastrophique au PSG, essaimé de prêts, qui s’est achevé par une rupture à l’amiable à quelques mois du terme de son contrat. Pourtant, le Gran Canarien avait tout pour devenir un grand de la Casa Blanca. Retour sur la période faste et le début du déclin d’un crack trop pressé. 

« Le football et la vie sont comme un escalier. Au début, chaque marche est facile. Une par une, puis deux par deux. Tu es jeune et tu dis que tu ne vas pas mettre longtemps à arriver en haut. Tu te sens fort, en confiance et tu le fais sans effort. Mais soudain, les choses de compliquent. Tu trébuches et tu tombes. Ton rêve se heurte à la réalité et se relever devient difficile. Tu te mets debout et tout ce que tu trouvais facile est à présent bien plus compliqué. Une marche est une montagne. Parfois, il vaut mieux la descendre pour reprendre une impulsion. La fin est encore loin mais on apprend de tout ». C’est par ce monologue de Jesé Rodríguez que commence le documentaire « ¿Qué pasó Jesé? » publié par Marca en septembre 2020. Il résume parfaitement la carrière du crack déchu, étoile montante du Real Madrid désormais sans club après 4 saisons chaotiques au PSG entrecoupées de prêts qui ont été au mieux des demi-réussites (Las Palmas, Betis) ou des échecs complets (Stoke City, Sporting CP).

Si la définition d’accident industriel avait un visage, à la case football apparaîtrait le portrait de Jesé. Lancé par Carlo Ancelotti au Real Madrid, le Gran Canarien avait tout pour lui : la vitesse, la qualité de passe, le sens du but. Certains y ont même vu le successeur de Cristiano Ronaldo, ni plus ni moins. Avec le recul, cela semble ridicule tant le joueur s’est perdu depuis son départ de la Casa Blanca, entre déboires sentimentaux, carrière de chanteur de reggaeton, surpoids et prêts foireux. Pourtant, le talent était là, jusqu’à ce qu’une rupture des ligaments croisés du genou ne fasse bifurquer la carrière du crack en puissance.

Malgré cette grosse blessure, le PSG a pris le risque de le signer à la hauteur de leurs réputations respectives : un contrat de longue durée, un salaire mirobolant de 400.000€ par mois et une indemnité de transfert de 25M€. Déjà en 2016, cette signature oscillait entre le pari et l’occasion en or de récupérer « la joya de la Fábrica ». A quelques mois de la fin du bail, le constat est sans équivoque : c’est une catastrophe sportive et financière. Et pendant que ses futurs ex-coéquipiers charbonnent en Ligue 1 et en Ligue des Champions, la dernière prouesse de Jesé a été d’appeler en direct Aurah Ruiz avec qui il compose un couple sur courant très alternatif (le joueur a eu une aventure avec Rocio Amar, autre bimbo locale de RealTV, pendant la soirée d’anniversaire… d’Aurah Ruiz, ndlr) lors de l’émission de téléréalité espagnole « La Casa Fuerte » à laquelle elle participe.

Joie Real Madrid – Jese – 02.01.2014 – Paris Saint Germain / Real Madrid – match amical – Doha

Descendu aussi vite qu’il est monté

C’était il y a 7 ans et c’est déjà une éternité. A 20 ans, Jesé était dans les petits papiers de Carlo Ancelotti après avoir été lancé par José Mourinho le 13 décembre 2011 en remplacement de l’idole Cristiano Ronaldo lors d’un match de Copa del Rey contre la Ponferradina. Une juste récompense pour celui qui cartonnait en Segunda avec le Castilla (22 buts et 12 passes décisives en 2011-2012, ndlr). L’entraîneur italien commençait à accorder une place de plus en plus conséquente dans la rotation du Real Madrid et l’avait pleinement intégré dans le groupe professionnel. Buteur lors d’un Clásico perdu (2-1) le 26 octobre 2013, l’ailier a enchaîné les bouts de matches lors de la phase aller avec de belles statistiques : 1 but et 3 passes décisives en 6 rencontres. Auteur du but de la victoire à Mestalla contre Valencia, Jesé reçoit même les félicitations de Florentino Pérez en personne et a les honneurs de la une de Marca avec le titre « il sera un crack mondial ».

Le début d’année 2014 marque l’explosion du Gran Canarien mais aussi sa chute. Après avoir disputé la 2e période contre Granada en remplacement de Gareth Bale, Jesé enchaîne 4 titularisations consécutives, marque 3 fois et adresse une passe décisive. S’il reste sur le banc contre l’Atlético de Madrid, il accumule encore les minutes contre Levante et Málaga. Tous les feux sont braqués sur lui. Il est estampillé « successeur de Cristiano Ronaldo » et il rêve à haute voix de remporter le Ballon d’Or d’ici 4 ans. Mais sa carrière prend un tournant malheureux en Ligue des Champions. Titulaire lors du 1/8 de finale retour contre Schalke 04, la nouvelle star merengue subit une rupture des ligaments croisés. « Tout le monde sait que c’était ma meilleure version, le meilleur moment de ma carrière, explique-t-il dans ¿Qué pasó Jesé?. Finalement, dans le football comme dans la vie, il peut arriver des choses que l’on n’attendait pas, qui sont injustes et imméritées. Mais il faut les affronter ».

Bicho, reggaeton et regain de forme

Opéré à Augsbourg en Allemagne, Jesé est éloigné des terrains pendant 8 mois. Une absence plus longue que prévu car le joueur a subi trois arthroscopies en raison d’un « bicho », une infection qui le contraint, sur les conseils de Jesús Olmo, ancien chef des services médicaux du Real Madrid, à arrêter les aliments sucrés. « Cette blessure m’a fait mûrir sur de nombreux points, explique-t-il. J’ai pris conscience de choses que je ne valorisais pas dans le football. Je me souviens que lorsque j’étais en récupération à Valdebebas, je voyais mes coéquipiers faire un rondo alors que moi je ne pouvais même pas marcher ». Quelques jours plus tard, sort de façon mal opportune « La Nueva Promesa », premier titre de Big Flow, son groupe de reggaeton. Son appétence pour le reggaeton ne s’est jamais démentie, même après la disparition du groupe, puisqu’il a également enregistré en solo sous le nom de Jey M, principalement quand il était sous contrat avec le PSG mais « Yo sabiá », sa première tentative en solitaire, est diffusé en 2015.

Jesé serre les dents et renoue officiellement avec la compétition en Copa del Rey contre Cornellà. Forcément, le joueur n’est plus exactement le même, même si les medias et le Real Madrid attendent avec impatience son retour. Son retour est modeste : 4 buts et 2 passes décisives en 23 rencontres. Mais le Gran Canarien s’obstine et veut convaincre Zinedine Zidane. « La saison 2015-2016 a marqué un rebond et, de mars à avril 2016, on a pu voir la version la plus proche de la promesse qu’il a été, écrit Fernando Tavero dans les colonnes de Diario AS. Avec 3 buts et 4 passes décisives, il a eu un rôle clef dans les 12 victoires consécutives, quand le Real Madrid de Zidane a donné des sueurs froides à un Barça qui a eu peur de perdre une Liga qu’il semblait avoir remporté dès Noël ».

Pari(s) manqué

Avec ce regain de forme, Jesé devait sans doute espérer une place plus importante dans la rotation merengue. Mais comment gagner du temps de jeu au milieu des Cristiano Ronaldo, Gareth Bale, Karim Benzema ? L’été 2016, l’ailier est un joueur attractif. Sa blessure au genou semble désormais loin. Jesé retrouve le haut niveau et des clubs sont intéressés. Le PSG arrache sa signature, avec les conséquences que l’on connaît. « Je suis parti du Real Madrid avec la motivation de vouloir jouer davantage, de devenir titulaire, de me battre pour être un jour sélectionné avec la Selección, détaille-t-il. J’ai signé au PSG parce qu’Unai Emery me voulait dans l’équipe ».

En quête d’une place à part entière de titulaire dans un grand club européen, Jesé n’a pas été particulièrement retenu par le Real Madrid. L’indemnité de transfert conséquente, la vie privée dissolue du joueur qui a eu des effets dévastateurs sur sa carrière en France (il a 4 enfants avec 3 femmes, ndlr), son goût pour la télé-réalité et ses starlettes, ainsi que sa carrière musicale sont des facteurs qui ont encouragé la Casa Blanca à larguer les amarres du Gran Canarien. Les dirigeants madridistas ont été perspicaces. Quatre ans après son départ, sa carrière est au point mort, même si lui croit dur comme fer que le meilleur de ses années de joueur est devant lui. Le PSG, lui, s’en mord encore les doigts. Qui sait, en étant un peu plus patient, Jesé aurait pu s’installer dans la rotation merengue et gagner ses galons de titulaire petit à petit. Malgré tous ses efforts, il ne restera sûrement qu’une petite étincelle qui n’a pas eu le temps de prendre feu et qui a fini par se griller.

François Miguel Boudet
@fmboudet

 

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