🗳 Élections Barça / 🎙Interview exclusive – Xavi Vilajoana : « S’il y a une personne qui a l’ADN Barça, c’est bien moi ! »

Unique joueur du FC Barcelone à avoir évolué au sein de la section football puis de la section futsal, Xavi Vilajoana a également travaillé depuis 2003 avec Joan Laporta, Sandro Rosell et Josep María Bartomeu. Prônant la cohérence, il refuse l’étiquette de candidat continuiste et met en avant ses réussites sportives au sein de la Masia et du Barça Femení. En exclusivité pour ¡Furia Liga!, il détaille en français les grandes lignes de son programme présidentiel. 

Pour commencer, et afin que les lecteurs puissent mieux vous connaître, pourriez-vous vous présenter ?

J’ai une très longue histoire avec le Barça. Mon père a été dirigeant du club pendant 18 ans à l’époque de Josep Lluís Núñez. J’ai joué à la Masia de 17 à 21 ans et j’ai intégré le Barça C, une équipe qui a disparu il y a quelques années. J’ai ensuite joué à L’Hospitalet, en Segunda B. J’ai ensuite effectué un changement de ma pratique : je suis le seul joueur du Barça à avoir évolué au football et au futsal où j’ai joué 4 saisons et porté le brassard de capitaine. J’ai par la suite entraîné une équipe de jeunes de futsal. En 2003, le président Joan Laporta m’a appelé pour professionnaliser la section de futsal car à l’époque elle était seulement semi-professionnelle. En 2010, Sandro Rosell m’a également demandé de collaborer avec lui. En 2011, Josep María Bartomeu m’a aussi demandé de lui donner un coup de main pour la Masia, le fútbol base et le Barça féminin. S’il y a bien une personne qui a l’ADN Barça, c’est bien moi ! Je porte le Barça dans mon cœur. Le club est dans un moment complexe, notamment avec la pandémie, et il faut quelqu’un qui connaisse le club. Il faut prendre des décisions dès à présent. On ne peut pas attendre 6 mois de plus. Je pense qu’il est très important de décider dès le premier jour. Pour cela, il faut aimer le club, le connaître, avoir de l’expérience aussi bien à l’intérieur du club qu’à l’extérieur. Ma candidature est bâtie par des gens très professionnels en ce qui concerne le Barça et qui sont en relation avec le football, comme cela est mon cas. J’ai aussi 4 diplômes universitaires, car j’ai toujours combiné ma carrière de joueur avec ma carrière professionnelle et il est rare de trouver ce genre de profil. Dans l’imaginaire populaire, on est soit l’un soit l’autre. Cette dualité n’est pas très courante dans la direction des clubs sportifs. Je pense que c’est une valeur ajoutée très importante.

« Pep Segura croyait qu’avec des joueurs plus forts et plus physiques, on avait la possibilité de produire le même modèle de jeu. Et ça, c’est impossible »

Entrons dans le vif du sujet : comment expliquez-vous ces 49 contrats avec le Barça B sous la direction de Josep María Bartomeu avec l’impression que le club ne formait plus pour son équipe première ?

Lors des 3 premières années, la direction sportive exécutive de ce champ de compétences a été absolument ratée. Les joueurs continuaient de monter dans notre système spécifique de formation jusqu’au Juvenil. Or, ils voyaient bien qu’il n’y avait plus de progression, notamment dans le sens et la manière de faire les entraînements. Du coup, ils partaient. J’ai eu de nombreuses batailles avec le responsable technique à ce moment-là car cela devenait problématique. On faisait tout pour que les joueurs restent et progressent au club mais le secrétariat technique, surtout Pep Segura, pensait que des joueurs différents pouvaient tout aussi bien jouer comme nous le voulions. Pep Segura croyait qu’avec des joueurs plus forts et plus physiques, on avait la possibilité de produire le même modèle de jeu. Et ça, c’est impossible. On a fini par lui retirer sa responsabilité sur le fútbol base. Pour moi, le centre de formation est un actif du club. Maintenant, les joueurs voient qu’on leur fait confiance. A titre d’exemple, cette saison, nous avons le Barça B et le Juvenil A les plus jeunes de l’Histoire. Nous avons également pu prolonger 95% de la génération 2004 qui va passer de cadete à juvenil alors que c’était à cette césure que nous avions beaucoup de joueurs qui partaient. On a fait du très bon travail.

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Vous avez déclaré que vous souhaiteriez voir rapidement l’effectif du Barça avec au moins 50% de joueurs issus de la Masia. Comment faire et avec quels hommes ?

C’est très facile : on les a déjà ! Si on prend la génération 2004, 6 joueurs sont déjà montés avec les Juvenil A et nous ferons en sorte que le Barça B incorpore d’ici 3 à 4 ans de très jeunes éléments. Il y a un joueur qui fait quasiment partie de l’équipe A, c’est Óscar Mingueza. Il y a aussi Konrad de la Fuente. Je suis sûr que, si j’écris 11 noms sur un papier et qu’on l’ouvre dans quelques années, au moins 8 sortiront du lot. Il est également très important de renforcer la figure de l’entraîneur. Il doit avoir l’appui du président dans le sens où nous ne jugerons pas son pari de s’appuyer sur la Masia. A la fin de chaque saison, il faut lui dire « tu as 15 joueurs professionnels mais parmi les autres places disponibles, tu dois choisir entre 7 et 9 joueurs que nous connaissons et que nous avons vu progresser ». Ça, c’est renforcer cette politique sportive. Une fois cette décision prise, ce sont aux joueurs de gagner leur place pour jouer, devenir titulaire grâce à l’enseignement de la Masia mais aussi par leur travail au quotidien.

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Comment avez-vous vécu la motion de censure à titre personnel ? Certes, c’était la figure de Josep María Bartomeu qui était visée mais cela a finalement englobé toute la direction et donc vous par la même occasion.

La motion est un aspect légal dans les statuts de notre club. Les socios ont la possibilité de la provoquer et de la signer. Cela dit, lancer une motion seulement pour avancer les élections de 2 mois, je ne sais pas si c’est le meilleur moment. Mais il faut respecter l’avis des 20.000 socios qui l’ont décidé. Au cours de cette présidence, il y a eu de bonnes choses, d’autres moins bonnes, comme partout. Dans l’histoire du FC Barcelone, aucun président n’a soit tout bien fait, soit tout raté. Alors, il faut prolonger les projets positifs et rectifier les autres.

Vous l’avez expliqué dans votre présentation : vous n’êtes pas un novice. Mais avoir fait partie de la direction Bartomeu est un avantage ou un inconvénient ?

Au niveau personnel, je crois que faire partie de la direction du club est toujours positif car cela donne la possibilité de constater par soi-même et d’agir. Je suis quelqu’un qui regarde toujours devant lui. Il faut apprendre, analyser, mettre en valeur tout ce qu’on a fait par le passé. Si j’avais regardé en arrière, je n’aurais jamais continué au sein du club et je n’aurais pas accepté les propositions de ces 3 présidents. Je veux convaincre que je peux faire et apporter. Moi, je suis un homme du Barça et chaque fois qu’on m’a demandé, j’étais là. Le moment est venu pour moi de faire ce dernier pas en avant afin de devenir président. J’espère que les socios le valoriseront.

Eu égard votre cursus au sein du club et aussi l’héritage de votre père, est-ce que vous vous définiriez comme continuiste ou nuñiste ?

Je me considère comme un candidat co-hé-rent ! (il insiste sur chaque syllabe). Pas continuiste mais cohérent. Quand on est dirigeant du Barça, on consacre de son temps sans rien gagner car on le fait par amour et par conviction. C’est pour ça que je dis que je suis cohérent. Quand on a fait appel à moi, je suis venu pour assumer, apporter mon expérience, mes connaissances. Maintenant, si je veux concrétiser les projets de la Masia et faire monter des joueurs au sein de la première équipe, il faut que je sois président. Ça, c’est cohérent, pas continuiste.

Quand nous l’avons interrogé, Jordi Farré a dit que les plus grands succès du Barça sous l’ère Bartomeu était le fútbol sala et la section féminine car il ne s’en était pas du tout occupé et qu’il avait mis quelqu’un de compétent.

Peut-être qu’il se réfère à moi (rires). C’est important de parler du Barça féminin car, quand on commence un projet, il faut d’abord penser à la base, aux fondations. Il ne faut pas se dire qu’on va payer pour avoir les meilleures joueuses. Aujourd’hui, 12 joueuses du Barça Femení sont sorties de la Masia. Avec ma restructuration et avec la méthodologie de la section féminine, cela rend service à toute la Masia, aussi bien pour les équipes féminines que pour les équipes masculines. Tous les entraîneurs du fútbol base enseignent les mêmes choses. Les joueuses peuvent monter et intégrer très tôt l’effectif de la première équipe. Ça, c’est la conséquence d’un processus débuté en amont. Mais il ne faut pas croire que les résultats seront immédiats. Y croire c’est se tromper complètement.

« Je suis très content de voir Mingueza bien jouer, car j’ai bataillé avec certains entraîneurs du fútbol base pour leur dire qu’on doit croire en lui, être patient car il a des caractéristiques qui sont propres au Barça »

Peut-on dire qu’actuellement, c’est le Barça Femení qui montre la voie au Barça masculin ?

Les équipes féminines sont plus jeunes, en termes historiques. Du coup, leur style de jeu est plus « puriste » car il y a moins d’influences extérieures. C’est l’idéal du modèle et ça se voit quand on regarde le Barça Femení. C’est quelque chose qu’on doit travailler dans la section masculine. J’insiste : il n’y a pas de différence. L’entraîneur de la première équipe doit avoir le courage de le faire. Mais je crois que Ronald Koeman a ça. Je suis très content de voir Mingueza bien jouer, car j’ai bataillé avec certains entraîneurs du fútbol base pour leur dire qu’on doit croire en lui, être patient car il a des caractéristiques qui sont propres au Barça. C’est un joueur qui ne se révèlera pas en Segunda B car c’est une division très ingrate, fondée sur la force et où le ballon est plus souvent dans les airs qu’au sol. C’est un joueur qui aura un meilleur rendement à un échelon plus élevé. C’est difficile de convaincre. Parfois, il faut dire à García Pimenta d’oublier le résultat. Être premier de Segunda B, ce n’est pas là l’important. Ce qui compte, c’est que le joueur progresse et qu’il soit préparé à intégrer l’équipe première. Ce n’est pas simple pour un entraîneur de se mettre à la place du formateur.

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A l’heure actuelle, l’entraîneur qui représente le mieux l’esprit Barça avec les résultats en prime, c’est Lluís Cortés. Est-ce que son profil pourrait correspondre pour devenir coach de la section masculine ?

En principe, il n’y a pas de différences entre les formateurs des sections masculine et féminine. En revanche, au niveau de l’équipe professionnelle, il y a la gestion du vestiaire et, en la matière, ce n’est pas la même chose. Il faut avoir quelque chose en plus que les connaissances, le professionnalisme car, tout simplement d’un côté il y a des femmes et de l’autre des hommes. Ça ne veut pas dire que les uns sont mieux et pas les autres mais c’est une différence anthropologique. Pour l’heure, je pense que nous avons les deux meilleurs entraîneurs, chacun dans sa section

Nous allons entrer dans une période de campagne électorale et donc de promesses. Certains candidats ont déjà avancé des noms, notamment Neymar, alors que d’autres trouvent irresponsable de s’avancer de la sorte. Quelle est votre position ?

La situation économique ne peut pas être prioritaire face aux décisions sportives. Ceux qui pensent qu’il est terrible d’organiser les élections le 24 janvier parce qu’il n’y aura pas de temps pour recruter, je leur réponds que le marché pour les jeunes joueurs de la Masia ne ferme pas le 31 janvier. Il est ouvert toute la saison ! Alors, je ne comprends ni les uns ni les autres. Ne pas pouvoir recruter un joueur face à la réalité économique et la date des élections ne sont pas des excuses.

Un retour de Neymar serait-il possible pour vous par exemple ?  

Non, parce que je suis un amoureux du collectif. On doit revenir au collectif, à notre modèle de jeu. Après si tu as ce petit plus du joueur qui fait la différence, c’est parfait. Mais dans notre histoire, le collectif a été la base de notre jeu, de nos succès et de nos titres. C’est cela que nous devons retrouver : le beau jeu.

Vous étiez au club il y a encore quelques semaines en tant que membre de la direction. Qu’en est-il réellement de la situation économique qui inquiète ? Est-elle si catastrophique ?

La catastrophe, c’est que les revenus ont chuté de 40%. Si on n’était pas dans une pandémie, on aurait pu discuter si la masse salariale est trop élevée et on serait sûrement tombé d’accord car nous avons fait des prolongations excessives. Mais nous n’aurions eu aucun problème sans la pandémie. Ça c’est certain. Maintenant tu dois t’arranger, demander des avances pour couvrir ce manque de trésorerie. C’est la même chose pour toutes les entreprises qui dépendent principalement du secteur des services, du tourisme. Evidemment, il faut corriger le reste, notamment la ligne des dépenses. Avec ma politique de confiance envers la Masia et mon souhait de ne pas offrir de prolongation au-delà de 31 ans par exemple, car à cet âge, la rétribution doit davantage s’effectuer en variables qu’en fixe, tu peux le corriger. Cependant, il ne faut pas oublier que tant que la ligne des revenus restera dans la normalité, la situation compliquée du Barça se règlera.

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Quel est votre opinion sur Leo Messi ? Faut-il faire tout tenter pour le prolonger ?

Si les socios votent pour moi, nous aurons un très beau futur. Avec Messi ou sans Messi, parce que le futur ne dépend pas que d’un seul joueur.

D’ailleurs, après la déclaration de Neymar après Manchester United-PSG, Leo Messi est annoncé au PSG avec certitude par des journalistes en France !  

(Rires) Ah bon ?! Déjà ?! Les résultats de la politique économique découlent de la politique sportive. Il faut parler avec Leo Messi, lui exposer ta manière de penser, ton projet. Tu dois lui expliquer son rôle à venir par rapport à son âge et c’est normal dans une carrière sportive. Par exemple, lui demander de se préserver pour être décisif quand il le faut, d’être celui qui va intégrer et aider les jeunes. Tu dois lui expliquer, lui montrer quelle est ton ambition et aussi l’écouter, car c’est un aspect très important. Les motivations d’un joueur pour rester dans un club sont cruciales. Il n’y a rien de pire dans une équipe que d’avoir un joueur qui n’est pas motivé. Il faut analyser tout ça et on le fera en tête à tête.

Vous l’avez fait ou vous le ferez ?

Je le ferai si je suis président.

Quel est l’avenir de l’Espai Barça au niveau institutionnel ? Faut-il faire à nouveau faire voter les socios et les impliquer davantage dans le processus ? 

Il est logique de redemander aux socios, parce que l’approbation a eu lieu il y a plusieurs années et le projet n’est plus exactement le même. En plus, je connais le sujet car c’est mon métier (il est diplômé en immobilier et urbanisme, ndlr) et quand tu commences un projet dans un quartier, tu entres dans des négociations avec la ville, la Generalitat et même si le projet global ne change pas, dans l’écriture du projet, il y a des choses qui changent. Ce projet est prioritaire parce que c’est ce qui sera le moteur des revenus du club. Il est donc important de le reprendre. Et il ne faut pas oublier les autres dossiers associés à l’Espai Barça. Il faut repenser tout ça pour les optimiser, quand commencer avec les ressources que l’on a. Ça reste un projet du club, ce n’est pas le projet d’un président. Il a été pensé depuis longtemps et je crois que tous les socios souhaitent sa réussite.

Le but est de développer les revenus en B2C mais aussi en B2B avec les partenaires, les sponsors et les entreprises qui voudront être associées à ce nouveau stade ?

Les revenus de ce stade seront les loges VIP, la billetterie, le naming éventuellement mais aussi des nouveaux actifs qui vont se créer, le nouveau musée et la nouvelle boutique. Ce sera la principale masse de revenus du club qui se créera uniquement avec le futur Camp Nou. Après, il y aura aussi le nouveau Palau Blaugrana. C’est tout le quartier de Les Corts qui est impliqué. Le nouveau Camp Nou doit être le centre névralgique de tous les amoureux du Barça parce qu’il va rester ouvert 365 jours par an. Il doit être notre priorité.

Quand vous évoquez de nouveaux actifs, est-ce en référence au développement du media Barça ?

Non, je parle d’actifs physiques, par exemple avec la présence de marques chaque week-end les jours de matchs, des zones qui créeront de nouvelles ressources pour le club.

Le Barça dispose déjà d’un grand espace au Camp Nou, contrairement à la majorité des clubs en Espagne. Le développer renforcera le lien entre le club et la ville de Barcelone ? 

Grâce aux accords avec la ville, nous allons créer un espace très ouvert avec de la végétation. On ne va pas fermer, ce sera toujours ouvert et cela va dynamiser le quartier de Les Corts. Je sais avec certitude que les personnes qui vivent dans ce quartier sont très très contents du projet. Moi, si j’étais eux et que j’habitais à Les Corts, je serais très heureux aussi (rires).

Deux projets sont en discussion dans la lignée de la modernisation du football, c’est la SuperLigue européenne et une réforme du format de la Ligue des Champions avec avec 32 ou 36 équipes. Qu’en pensez-vous ?

Cette SuperLigue est très embryonnaire. Il s’agit de discussions afin d’analyser le souhait de tous les clubs. Je crois que c’est très tôt pour savoir réellement si ça peut devenir une réalité. Il faut bien sûr discuter avec les fédérations de tous les pays parce que l’aboutissement de ces projets aurait de grandes conséquences.

Propos suscités par Tracy Rodrigo et François Miguel Boudet

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