Liga / Real Betis : Cristian Tello retrouve le Barça et veut changer de statut

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Apparu comme un éclair lors de la fin de règne de Pep Guardiola au FC Barcelone, Cristian Tello a vécu depuis plusieurs vies. Garçon qui a plus connu l’échec que la réussite, malgré un talent certain et une armoire à trophées bien remplie, le natif de Sabadell approche de la trentaine et n’a encore jamais vécu une saison pleine en tant que titulaire indiscutable. Avec Pellegrini, Cristian Tello veut enfin devenir plus qu’un talisman qu’on utilise seulement quand ça va mal et qu’on cherche à vendre à chaque mercato.

Il est difficile d’imaginer une situation plus enviable pour un jeune footballeur que de démarrer sous les ordres de Pep Guardiola à Barcelone après avoir confirmé son talent avec la B des Blaugrana. Sauf que voilà, alors qu’il a tout juste 20 ans et aucun match en Liga, Cristian Tello a déjà vécu des choses compliquées. Celui qui est encore un attaquant de pointe en jeune rejoint très vite la Masia. Il est agile devant les bois, Tello marque beaucoup et est rapide, mais on le trouve trop léger physiquement. Son aisance technique est aussi limitée. A 16 ans, on l’envoie au casse-pipe avec un prêt au CF Damm, un club ami des Culés. Son entraineur là-bas, Oscar Cosialls est revenu sur l’arrivée de Tello pour Sofoot en 2013 : « Quand on l’a vu débarquer, on s’est dit qu’il était bien trop fin, bien trop maigre. Alors, il a souvent commencé sur le banc ». La première d’une longue liste de désillusions pour celui qui va se transformer en ailier moderne avec des déplacements d’un autre temps.

Un apprentissage chaotique 

Toujours dans les bons coups mais jamais indiscutable, Tello va se trainer longtemps cette étiquette de bon joueur qui n’arrive pas à franchir un palier. Oscar Cosialls toujours pour Sofoot confirme cette impression d’un joueur qui arrive toujours à être décisif : « Dès qu’il jouait, il marquait. En terme de rentabilité but/minutes sur le terrain, il a toujours été le meilleur  ». Les lacunes sont nombreuses et criantes, mais Tello dispose de qualités rares pour un jeune. Il a les deux pieds, il est très rapide et une excellente exécution de frappe. Surtout, il cadre, énormément et ne doute jamais ou presque de lui. Ce que son coach à Damm confirme, se souvenant d’un jeune très fort dans la tête : «  Parfois, il pensait tellement qu’il allait réussir que ça le faisait tomber de haut. Mais il se relevait  ».

Oscar Cosialls est le premier à lui conseiller de varier ses frappes en essayant de toucher des zones différentes et surtout éviter de tirer à des endroits qui ne mettent que peu les gardiens adverses en difficulté. Après un court passage à l’Espanyol ensuite, Tello retrouve le Barça en 2010. Il a 19 ans, il a grandi, il a pris du muscle, il semble plus fort que jamais. Sous les ordres de Luis Enrique puis d’Eusebio avec la B, le natif de Sabadell se fait remarquer. Devenu un ailier excellent capable de jouer sur les deux côtés, même si plus à l’aise à gauche, il va rejoindre la liste des joueurs qui ont connu le Barça en pro sous Guardiola. Aucun n’aura une très grande carrière, mais Guardiola veut valoriser ces jeunes, les faire grandir, les modeler pour aider son équipe.

« Cristian est un ailier, une balle. Il est très rapide et se débrouille bien en face à face. C’est un très jeune joueur qui finira par mûrir, mais jusqu’à présent, il réalise de bonnes choses. » Pep Guardiola en 2012

En 2012, après une victoire face à la Real Sociedad où Tello a trouvé le chemin des filets, le Catalan est content de son jeune joueur. Sans jamais vraiment remettre en cause la hiérarchie des offensifs Blaugrana, ses entrées sont remarquées, ses lacunes aussi. Beaucoup pensent que Pep est aussi patient avec lui parce qu’ils ont les mêmes représentants. En 2013, quand il reçoit sa première et seule convocation avec la Roja, les critiques sont toujours présentes alors que Tello a dépassé Cuenca dans la hiérarchie. Sous Tito Vilanova en 2012-2013, il va réaliser sa meilleure saison avec les Catalans : 28 matchs, 8 buts et une prolongation de contrat. Sauf que voilà, alors que Tello est en pleine bourre, la nomination de Tata Martino casse la dynamique. En 2014 il est contraint au départ et il choisit l’exil.

Il rejoint le FC Porto de Julen Lopetegui. Le futur sélectionneur de la Roja aime son profil. Lui le chantre de la possession a besoin d’un joueur tonique, qui peut provoquer, faire gagner des mètres et surtout créer des espaces ou en profiter. Sans être un titulaire indiscutable, il termine avec 7 buts cette première saison hors d’Espagne, dont 6 marqués en l’espace d’un mois avec notamment un triplé face au Sporting Portugal. Ici, on aime sa capacité à provoquer, courir et faire des différences mais on lui reproche sa faible activité à la perte et sa propension à disparaitre totalement durant des semaines. Le départ de Lopetegui le conduit de nouveau au départ lors de la saison suivante, qu’il a pourtant débutée avec les Portugais. Il rejoint la Fiorentina de Paulo Sousa, encore en prêt.

Crédits : Iconsport

En Italie, Cristian Tello va une nouvelle fois apprendre, beaucoup, à défaut de vraiment confirmer son talent. Au contraire même, il va pour la première fois dépasser la barre des 2000 minutes en championnat lors d’une saison et passer le cap des 20 titularisations, en 2016-2017, tout en ne trouvant le chemin des filets que 4 fois. Cependant sous les ordres de Paulo Sousa, Cristian va enfin se mettre à travailler sans le ballon. Son activité à la récupération va être décuplée, celui qui deviendra l’entraineur de Bordeaux va marquer l’ancien du FCB. Pour El Pais, en novembre 2018 après une question sur l’entraineur qui l’a le plus marqué, la réponse de Tello est claire : « Paulo Sosa, à la Fiorentina. Avoir joué dans des cultures différentes vous rend plus polyvalent. Setién m’a mis sur la voie et je savais déjà beaucoup de choses qu’il me demandait. A la Fiorentina, cela m’a coûté cher car il faut apprendre à défendre. J’avais l’habitude d’être suivi et je devais suivre le rival et défendre les centres depuis les ailes. Parfois, je trouve toujours bizarre de défendre dans ma zone. L’avantage c’est que j’ai beaucoup de place pour avancer dans mon couloir. Bien sûr, cela exige votre meilleure condition physique. »

Constant dans l’inconstance 

A l’été 2017, Paulo Sousa est parti de la Fiorentina, Chiesa est apparu et la pertinence de transformer le prêt de Tello en incorporation durable n’est pas établie en Italie. Le natif de Sabadell repasse par la case Barcelone sans pour autant récupérer 200 euros à la banque et file directement au Betis pour 4 millions d’euros. Quique Setien voit dans Cristian la même bénédiction que Julen Lopetegui avant lui. L’ancien de la Masia a tout pour mettre en valeur son jeu de possession et de position. Sa polyvalence, sa capacité à marquer, à se démarquer, sa faculté à attaquer l’espace quand il se présente où à la créer quand il n’est pas là en font une recrue de choix pour l’ancien de Las Palmas. On aime sa capacité à mordre la ligne, tout en pouvant occuper le demi-espace entre le latéral et le central adverse mais aussi sa facilité à se trouver en situation de frappe. Il doit être la foudre dans le jeu de possession du fan de Santander.

Sous les ordres de l’entraineur originaire de Cantabrie, Tello va beaucoup jouer sans pour autant devenir un indiscutable. Il est ce joueur qu’on utilise un peu partout, il va même être testé dans le cœur du jeu, mais qui n’arrive pas à vraiment s’installer. Pire, il est bien plus décisif quand il est sur le banc que quand il est titulaire d’entrée de jeu. Son style est plus utile à son équipe quand il entre en seconde période et profite des espaces laissés par un bloc fatigué. C’est un d’ailleurs un changement pour lui. Avant son arrivée au Betis, près de 80% de ses buts étaient marqués lorsqu’il était titulaire, une statistique qui est tombée à 30% depuis qu’il porte la tenue verdiblanco.

Quique Setien l’apprécie, mais Tello ne gagne pas en consistance. Joker ou talisman, il est encore rétrogradé lors du licenciement du futur coach du Barça remplacé par Rubi. Le Catalan lui l’utilise encore moins, il ne dépasse pas les 800 minutes en Liga lors de la saison 2019-2020. Pire encore, il est annoncé proche du départ lors du mercato hivernal. L’Espanyol et le Celta veulent le signer mais Tello finit par rester. Il marquera ses deux seules réalisations de la saison en championnat ensuite, dont le but de la gagne face au Real Madrid en juin. Tello est encore au Betis, Rubi lui a plié bagage.

Enfin du changement avec Pellegrini ?

Son histoire n’a jamais aussi proche de la fin avec le Betis que cet été. Cristian Tello semblait avoir grillé toutes ses cartouches disponibles et semblait prédestiné à rejoindre la longue liste des talents éphémères lancés par Pep au Barça. Sauf que voilà, il a de la ressource Cristian et rien ne semble pouvoir l’abattre. Pas dans les plans de Mauricio Pellegrini en début de saison, le Chilien lui préfèrant Joaquin ou Canales, l’ailier va saisir la première opportunité qui se présente à lui. Le 13 septembre, il entre à la place de Carvalho face à Alaves à la 82e minute et le score est de 0-0. 12 minutes plus tard, c’est lui qui célèbre son premier but de la saison. Le 3 octobre, il trouve le chemin des filets face à Valence. Puis face à Elche le 1er novembre, il est impliqué sur les trois buts des Andalous avec un doublé et une passe décisive. Avec 4 réalisations en 400 minutes, il a déjà égalé son meilleur total avec les Verbiblancos. Mieux, il est l’un des joueurs de Liga les plus décisifs sur ce début de saison avec un nombre de minutes bien plus faible qu’Oyarzabal et Benzema, ceux qui le devancent.

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Une forme surprenante, un rendement qui a chamboulé les choix tactiques du Chilien, au point d’éjecter Carvalho du onze titulaire, d’installer un double pivot Canales-Guido et d’accorder une place de titulaire à Tello, l’un des ailiers les plus en formes du championnat actuellement. Le Chilien est content du rendement de son joueur : « Tello a beaucoup de capacité, beaucoup de talent et beaucoup de vitesse. Il doit être un joueur de déséquilibre, comme Nabil et Joaquin doivent l’être, donc la vérité est que je suis très heureux pour lui. Maintenant, il doit maintenir le niveau dont il a fait preuve aujourd’hui tout au long de la campagne. »

Pour être perçu comme un joueur capable d’être un titulaire au Betis Seville, Cristian Tello à du étoffer son jeu, lui qui a été formé comme un buteur mais qui est devenu un ailier au fil du temps. Il est conscient que ce poste n’est pas le plus en vue dans le football moderne, il s’était confié à El Pais en 2018 sur l’évolution du rôle d’ailier : « Il n’y a plus de joueurs collés à la ligne, à la recherche du dribble et de un contre un, comme je le faisais à mes débuts pour trouver le centre de la zone. Le football a évolué et nous a condamnés à cette conversion en arrières latéraux ou joueurs de couloirs. Dans mon cas, c’est clair, soit vous vous adaptez, soit vous prenez du retard. C’est quelque chose de déjà courant, on le voit aussi avec Navas et Jordi Alba. ». 

Pourtant en 2020, Cristian Tello est toujours un ailier et n’a pas reculé pour devenir un latéral. Cependant il a grandi, ses qualités sont toujours là, il sait être rapide et faire parler la poudre. Mais il a aussi intégré d’autres options pour exister durant 90 minutes, c’est un excellent récupérateur, il se projette très facilement et lit très bien le jeu. Il a aussi une bonne vision du terrain et a progressé techniquement. Bien sûr, ce n’est pas un crack mais Tello s’accroche à sa destinée et veut prouver qu’il a le niveau et le talent pour être titulaire dans la durée en Liga. Avec Pellegrini, il a une nouvelle chance de s’imposer. Face au Barça aujourd’hui, il pourrait pour la première fois enchainer cinq rencontres de suite de Liga en tant que titulaire. Une statistique qui en dit long, pour un joueur qui approche de la trentaine, autant sur son mental que sur sa capacité de progression. Et si Cristian Tello devenait le nouveau Aduriz, en étant meilleur après 30 ans qu’avant ?

Benjamin Bruchet 

@BenjaminB_13

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