Real Madrid : Mais pourquoi Zidane ne fait-il pas confiance aux jeunes de la cantera ?

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Zinedine Zidane aurait pu initier un nouveau cycle au Real Madrid après l’élimination en 1/8 de finale de la Ligue des Champions contre Manchester City. Le reconquête du titre en Liga semble avoir conforté l’entraîneur français de continuer avec les mêmes joueurs. Le départ de Sergio Reguilón à Tottenham est le dernier transfert en date d’un canterano merengue. De quoi interroger sur la viabilité d’un effectif vieillissant et sur les capacités de ZZ d’incorporer du sang neuf dans la rotation.

Jesús Vallejo, Javi Sánchez, Achraf Hakimi, Marcos Llorente, Luca Zidane, Raúl de Tomás, Álvaro Tejero, Óscar Rodríguez, Dani Gómez, Jorge de Frutos, Miguel Beaza, Sergio Reguilón en attendant certainement Borja Mayoral : la liste des canteranos qui n’ont pas les faveurs de Zinedine Zidane s’allongent de saison en saison. Si certains d’entre eux ont connu de trop nombreuses blessures (Vallejo) ou paraissent tendres pour défendre le maillot merengue (Sánchez, Tejero, Gómez, De Frutos, Beaza, Zidane), d’autres auraient toute leur place dans la rotation du Real Madrid. Hakimi, Llorente, De Tomás, Óscar et Reguilón ont connu la réussite loin de Santiago-Bernabéu. Les deux derniers cités sont même devenus internationaux espagnols et Llorente s’en rapproche après tous les progrès effectués à l’Atlético de Madrid sous les ordres de Diego Simeone. De quoi interroger sur le management de ZZ.

Valverde et Asensio, exceptions à la règle

Ancien entraîneur du Castilla, Zinedine Zidane fait-il une allergie aux canteranos de la Fábrica ? Même son fils Luca n’a pas droit à un traitement de faveur et est actuellement sans contrat. Jusqu’à présent, ZZ n’a intronisé que Fede Valverde et Marco Asensio suite à un prêt. Si la progression du Mallorquin a été interrompue par une rupture des ligaments croisés, l’Uruguayen quant à lui est parvenu à gagner du temps de jeu (69 matches en 2 ans). Il fait figure d’exception. Martin Odegaard s’ajoutera-t-il ou le Norvégien sera-t-il relayé loin dans la hiérarchie ?

Le Real Madrid vieillit mais cela ne semble pas déranger Zinedine Zidane. La Liga remportée accrédite son management, même si la qualité de jeu à moins à voir dans ce résultat que la faillite des rivaux et la grande valeur mentale des Vikingos. Suffisant pour l’Espagne mais trop léger pour la Ligue des Champions. Pour la première fois de sa carrière, le Marseillais a été éliminé en C1. Un retour à l’ordinaire après l’extraordinaire triplé de la « première ère ZZ ».

Centre de formation reconnu, la Fábrica n’a pas les grâces de Zinedine Zidane qui ne souhaite manifestement pas prendre le temps d’incorporer les jeunes pousses du cru dans la rotation, même dans un rôle mineur. Eder Militao et Ferland Mendy en défense, Vinicius Jr et Rodrygo en attaque : l’entraîneur merengue utilise les talents venus d’ailleurs alors que le fonctionnement de la Fábrica a un coût. D’après Diario AS en 2017, un total de 20M€ était alloué au centre de formation : 5 pour le Castilla et 15 pour les autres catégories et les coûts fixes.

350M€ de ventes et 8% de la Liga

En octobre 2016, lors de l’Assemblée Générale des socios, FloPer avait consacré une partie de son discours au rôle de la Fábrica « où se forment les grands joueurs du futur. Huit joueurs de l’équipe première sorte de la cantera et, à l’heure actuelle, 51 joueurs évoluent en Primera, 53 dans les championnats internationaux et 38 en Segunda, soit un total de 152 répartis dans le monde entier ». Quatre ans plus tard, les chiffres ont quasiment diminué de moitié. En 2020, ils sont 83 (42 en Espagne, 41 à l’étranger) à jouer dans une première division européenne. En Liga, 8% des joueurs sortent de la Fábrica ! Dans l’effectif, ils ne sont que 4 : Dani Carvajal, Nacho Fernández (le seul à s’être fait une place sans prêt), Lucas Vázquez et Mariano Díaz. Hormis le latéral droit, les autres jouent les utilités.

En termes de rentrées d’argent, la Fábrica permet de faire entrer de l’argent frais. Depuis 2009 et le retour de Florentino Pérez à la tête de l’institution merengue, le Real Madrid a récupéré environ 350M€. Parmi les gros coups, figurent Álvaro Morata (20 M€ à la Juventus puis 66M€ à Chelsea), Achraf Hakimi (40M€ + 5M€ de bonus éventuels à l’Inter), Marcos Llorente (40M€ à l’Atlético de Madrid, Jesé (25M€ au PSG) et Raúl de Tomás (25M€ à Benfica). « Le transfert d’Achraf Hakimi consolide la tendance initiée lors du 2e mandat présidentiel de Florentino Pérez, écrivait Rubén Cañizares dans les colonnes du quotidien ABC le 1er juillet dernier. Le Real Madrid n’a jamais été et ne sera jamais un club vendeur. Mais s’il faut libérer des joueurs, il ne fera pas de cadeau, contrairement à ce qui se passait historiquement avant le changement de gouvernance initiée par le président. Un nouveau mode de gestion des finances du club dans lequel sont entrés les canteranos qui attireraient l’attention au niveau continental, dont les départs ne seraient pas à prix cassés. C’est ce qui s’est passé avec Achraf, mais il y a beaucoup d’autres cas ». 

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Raúl pour initier un nouveau paradigme ? 

Si ZZ a certainement des raisons qui lui sont propres, pourquoi ne croit-il pas davantage en la formation madridista ? Outre le fait que le signal envoyé aux catégories inférieures est négatif, alors même que les U19 (la Juvenil A, ndlr) ont remporté la première Youth League de l’histoire du club sous les ordres de Raúl González Blanco lui-même lancé à 17 ans en 1994 par Jorge Valdano, cela permet à la concurrence espagnole et européenne de se renforcer. Hakimi, Reguilón, Óscar, Llorente voire De Tomás ont prouvé leur valeur et ne dépareilleraient pas dans cet effectif, et c’est sans parler de Dani Ceballos, Álvaro Odriozola, Diego Llorente (dont la clause de rachat n’a jamais été levée alors que le défenseur de la Real Sociedad est international) et Brahim Díaz qui ont vite compris que leur destin ne passerait pas par le maillot immaculé.

Le Real Madrid entretient donc un paradoxe qui n’est pas propre à Zidane mais qui s’amplifie avec lui : la formation est performante mais les chances d’accéder directement à l’équipe première sont pour ainsi dire inexistantes et guère davantage après un prêt. Certes, la Quinta del Buitre à la fin des années 80 et les fameux « Pavones » qui accompagnaient les « Zidanes » à l’époque des Galactiques au début du XXIe siècle sont des exceptions. Les Vikingos ont principalement misé sur les talents extérieurs, contrairement au FC Barcelone dont le paradigme est à l’opposé du moins en théorie. Pour autant, ce n’est pas comme s’il y avait un manque de réservoir.

Ce succès signé Raúl González Blanco pourrait-il à même d’initier un nouveau paradigme ? Si le Real Madrid rêve toujours de s’offrir Kylian Mbappé, l’arrivée de jeunes joueurs talentueux et capables de se mettre à la hauteur d’un grand rendez-vous pourrait favoriser l’arrivée prochaine d’El Eterno Capitán sur le banc merengue à très court terme. « C’est un triomphe pour la cantera, a écrit Ulises Sánchez-Flor dans les colonnes d’El Confidencial le 25 août dernier. La Fábrica récolte ses fruits dans un contexte de crise économique dans le football provoqué par les effets du coronoavirus. Il faut regarder ces gamins, croire en eux et parier sur ces talents. On réclame plus de cantera et moins de carnet de chèque ». 

L’avenir au Real Madrid des Iván Morante, Antonio Blanco, Sergio Arribas, Miguel Guttiérez, Juan Latasa ou encore Israel Salazar dépend-il du maintien de Zinedine Zidane ? L’incorporation de cette nouvelle génération paraît difficile tant que le Marseillais sera sur le banc et qu’il renâclera à impliquer davantage des joueurs du cru. A la plus grande joie des rivaux des Vikingos, ravis de pouvoir récupérer des joueurs performants et pleins d’avenir.

François Miguel Boudet
(@fmboudet)

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