Si le nom d’Ansu Fati vampirise les débats en Espagne, la nomination de Pau Torres pour les matchs face à la Norvège et la Suède a braqué les projecteurs sur le central de Villarreal. A 22 ans et seulement dix matchs de Liga, le gaucher rejoint pourtant déjà les A de la Roja. Cet appel vient récompenser le formidable début de saison du natif de Vila-Real et apporte une solution en plus pour épauler Sergio Ramos. Portrait d’un central qui gravit les échelons rapidement sans se brûler les ailes.
Pau Torres n’a que 22 ans, débute sa première saison en tant que membre à part entière de Villarreal, mais supporte sur ses épaules une pression déjà forte. Lui, ce symbole parfait du projet de Roig, entamé un an avant sa naissance. A cette époque, Villarreal n’était qu’un petit club parmi d’autres, sans projet ni centre de formation compétent et avec un stade en décrépitude. En 2019, tout a changé. Le sous marin jaune est devenu un solide club de Liga avec un passif européen. Malgré un nombre de jeunes lancé dans le grand bain conséquent, il manquait un gars du cru capable de représenter fièrement la région. Avec l’émergence de Pau Torres, le voilà comblé, d’autant que le golgoth a déjà un niveau de performance élevé. Présentation d’un garçon pressé qui épate son petit monde.
Pau Torres, une formation linéaire
Le central, natif de la région de Vila-Real, a rejoint le sous-marin jaune très tôt, à l’âge de six ans. Il gravit les échelons un à un et se forme physiquement tout en développant sa lecture du jeu et son utilisation du ballon. Son nom apparaît pour la première fois en Liga en novembre 2017. Pour le compte de la onzième journée de Liga, il dispute six minutes face à Séville. Il rejoue une mi-temps la même saison face à l’Athletic, lors de la 31ème journée. Dans le même temps, il devient un cadre de la filiale de Villarreal, qui évolue en Segunda B et qu’il a rejoint en 2016. Avec la B, il joue près de soixante matchs de championnat et participe aux barrages d’accession en Segunda en 2018. Son équipe est battue en finale, mais Pau Torres semble prêt à franchir un palier.
Bien qu’apprécié par sa direction, Pau Torres est envoyé en prêt à Malaga la saison précédente. Un club qui a tissé depuis longtemps des liens étroits avec le sous-marin jaune et qui semble adéquat pour polir le diamant Torres. Il rejoint Malaga peu avant le début du championnat mais va très vite devenir un incontournable pour Muniz puis Victor Sanchez. Dix jours après l’officialisation de son prêt, le gaucher est titulaire face à Lugo pour le premier match de championnat. Pour sa première saison à ce niveau, Pau effectue quarante matchs sur quarante-deux.
Le club n’est pas encore empêtré dans ses soucis financiers et performe, grâce à l’arrivée de Victor qui relance la machine et atteint le podium. Pau Torres est le leader défensif de la deuxième meilleure arrière-garde de Segunda. Sa lecture des trajectoires, sa capacité à bien se mouvoir tout en étant très à l’aise avec le ballon impressionnent. Malage a beau échouer lourdement face au Depor en demi-finale des play-offs d’accession, Pau Torres a réussi son objectif. Il a confirmé son talent et rentre à Villarreal empli de certitudes sur son jeu. De quoi prétendre à de grandes choses en Liga.
Pau Torres, la pression il la boit
Lors de l’été 2019, Pau est donc de retour à Villarreal sans avoir été convoqué pour disputer l’Euro U21 avec la Rojita. Il assiste au titre de sa sélection à la maison en restant en contact avec son ami Javi Ontiveros, qui quitte Malaga pour Villarreal en toute fin de mercato. Le gaucher sait que son explosion est attendue. Juste avant de prolonger son contrat jusqu’en 2024 avec une clause de 50 millions, il confie. « Villarreal a une formation puissante. Je suis le fruit du rêve que la famille Roig et Llaneza avait il y a longtemps ». Une déclaration qui fait écho à une autre, recueilli par AS cet été.
« Je suis conscient du fait que beaucoup de gens veulent que quelqu’un ici, quelqu’un de Vila-real, puisse être un membre actif de l’équipe et être un protagoniste. C’est une grande responsabilité, mais en même temps c’est quelque chose de très spécial et cela me donne envie de le réaliser. C’est une très belle motivation, j’ai des options pour y être et travailler pour que cela puisse arriver. J’espère que je peux être à la hauteur. Et je suis conscient de l’illusion qui est placée en moi. »
Cette prolongation est arrivée un jour avant l’annonce de Robert Moreno, alors que Pau Torres avait joué et formé avec Raul Albiol une paire de centrale très complémentaire lors des sept premières journées de Liga. Associé à un vétéran duquel il apprend beaucoup, la solidité et la sérénité du gaucher détonnent. Après des débuts un peu timides, le central a vite montré l’étendu des qualités aperçues en Segunda B et confirmées en Segunda. En dépit d’un physique imposant (il dépasse le mètre quatre-vingt-dix), c’est sa science tactique qui saute aux yeux. « Je suis un défenseur plus positionnel que brutal et rapide, plus à anticiper. J’aime être en contact avec le ballon et je pense avoir la capacité de relancer de derrière. » confiait-il à As.

Ce bon début de saison a donc été validé par Robert Moreno, qui l’a sélectionné pour les matchs face à la Suède et la Norvège. Le sélectionneur s’est expliqué sur les raisons de l’arrivée d’un jeune aussi expérimenté avec l’Absoluta. « Cette saison, nous le suivons depuis la première minute. Il a certaines conditions naturelles que nous aimons, une bonne sortie, tactiquement, c’est un excellent central. Conforme à ce que l’on attend d’un défenseur. Et ce que vous devez améliorer, je vous le dirai quand je voudrai sans entrer dans le travail de Calleja. Il peut être un grand central dans le futur. » Son pied gauche, sa qualité de relance et sa facilité à lire les trajectoires en font sur le papier un complément idoine à Sergio Ramos. Une idée que le sélectionneur pourra donc mettre en place.
Un environnement sain pour survire à cette emballement
En l’espace d’une année, Pau Torres est passé de débutant en Segunda à international A. Une progression logique au vu des qualités du joueur mais qui peut préoccuper. Beaucoup de joueurs se sont en effet brûlés les ailes pour moins. Cependant, Pau Torres n’a pas chamboulé ses habitudes du quotidien. « Je vis toujours à Vila-real, près de ma famille et de mes amis. Cela facilite la vie quotidienne. Pour moi, c’est un immense privilège d’être aimé des habitants de ma ville. » Encore dans un cocon, Pau Torres vit un rêve d’enfant et apprécie la reconnaissance autour de son excellent niveau.
Comme il a profité des grands travaux à Villarreal pour se faire une place, il peut s’aider du chamboulement en sélection pour débuter de la meilleure des manières sa carrière internationale. Symbole de la formation de Villarreal en club, symbole du renouveau de la sélection espagnole qui se veut plus inclusive et moins réservée aux ogres du championnat, Pau Torres a une réelle carte à jouer lors de cette trêve. A lui de saisir l’opportunité qui lui sera accordée, encore une fois.
Benjamin Bruchet
@BenjaminB_13