Mondial 2019 : Comment l’Espagne est passée proche de la catastrophe contre l’Afrique du Sud

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L’Espagne a remporté son premier match lors d’un Mondial féminin. Mieux, elle est 1re du Groupe B. Sur le plan comptable, la mission est remplie. Sur le plan du jeu, en revanche, la Roja a pataugé contre l’Afrique du Sud. Le 4-3-3 de Jorge Vilda n’a pas trouvé la solution face à la solidité tactique des Banyana Banyana et s’en est remis à deux coups du sort.

Au coup d’envoi, aucune surprise : Jorge Vilda aligne son équipe-type positionnée en 4-3-3.

A priori, l’Espagne, 14e nation mondiale, est au-dessus de l’Afrique du Sud, certes vice-championne d’Afrique 2018 mais pointant au 49e rang du classement FIFA. En termes d’expérience, la Roja est également mieux armée puisque les Banyana Banyana disputent leur 1er match de l’histoire en Coupe du Monde alors que 13 Espagnoles étaient du voyage au Canada en 2015. Bref, tout est réuni pour réaliser une belle entrée en matière, en s’inspirant de la France qui s’est facilitée les choses en marquant rapidement plutôt que de l’Allemagne qui, plus tôt dans l’après-midi, a eu toutes les peines du monde à disposer de la Chine.

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4-3-3 sans vitesse contre 4-4-2 agressif

L’Espagne a pris le match de la bonne façon, à sa manière, avec du jeu court au sol et une volonté d’écarter le jeu pour étirer et fatiguer le bloc très regroupé sud-africain. Les latérales ont apporté offensivement, avec une vraie volonté de créer le décalage. Or, les Banyana Banyana avaient prévu le coup et ont su coulisser pour bloquer les côtés.

Le 4-4-2 de Desiree Ellis était rodé pour quadriller la moitié de terrain et asphyxier la Roja. Rien de surprenant en somme. Ce qui n’a pas empêché la Selección de balbutier son football. Rapidement, Amanda Sampedro et Mariona Caldentey ont échangé de côté. Les Sud-Africaines ont suivi leur plan pendant que leurs adversaires se sont escrimées à vouloir passer dans l’axe. La meilleure occasion de la 1re période a été un coup franc non cadré de Mapi León.

Quand les offensives se rapprochent de la zone de décision, les Espagnoles se liquéfient, n’osent pas frapper, refont un contrôle ou une passe. Le pressing agressif adverse les empêche de pratiquer le football qu’elles veulent. Le 4-3-3 ne paraît pas la bonne solution pour venir à bout de ces deux lignes de 4.

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Plan B a minima

C’est là où Jorge Vilda a payé son absence de véritable plan B. Plus les minutes passaient, plus on se disait qu’à cette équipe « le falta gol », c’est-à-dire qu’il lui manque une véritable numéro 9, voire une 9 de rechange. Dans cette liste, seule Nahikari García est une pure buteuse, au contraire de Jenni Hermoso qui participe beaucoup au jeu, décroche, aère les transmissions mais manque quelques fois de présence dans la surface. C’est dans un 4-4-2 qu’elle est devenue la meilleure buteuse de Liga cette saison. Avec sa palette technique, elle peut dévier, passer, trouver une inspiration brillante pour la 2nde pointe.

Le sélectionneur s’est rendu compte du problème et a sorti Vicky Losada et Amanda Sampedro à la pause. La preuve de sa composition ratée. Pour les remplacer, il a choisi de lancer Aitana Bonmatí et Lucía García, deux profils offensifs, davantage dans la recherche de la verticalité. Bien en a pris à Vilda puisque García a provoqué le second penalty et marqué le 3e but. Cependant, il est un peu tôt pour parler de Plan B comme peut le faire la presse espagnole. Contre des Banyana Banyana fatiguées et avec un arbitrage ultra favorable, la Roja a pu s’en sortir. Mais jusqu’à la 68e minute, l’Espagne n’y arrivait pas malgré l’ajustement de la mi-temps.

 

Lenteur défensive

Sur le plan offensif, l’Afrique du Sud n’a rien proposé d’imprévisible. Relance rapide sur les attaquantes, prioritairement sur Thembi Kgatlana, meilleure joueuse d’Afrique 2018. Il ne lui a fallu qu’une seule occasion pour trouver le chemin des filets et mettre la Roja face à ses incertitudes. Marta Torrejón trop lente pour monter sur l’attaquante, Sandra Paños dépassée par les événements : une accélération, une frappe, un but. Basique mais suffisant contre cette Espagne lente et pas du tout entrée dans son Mondial.

Malgré les deux changements, la Roja s’est enfoncée dans les mêmes travers et la même fébrilité. Collectivement, la Selección était aux abois. Les Banyana Banyana ont attendu les contres pour plier la rencontre et n’est pas loin d’y parvenir quand Mapi León a été prise de vitesse et que Sandra Paños a sauvé miraculeusement du bout du pied le tir de Kgatlana.

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L’arbitrage a sauvé l’essentiel

La Absoluta n’avait pas l’air de s’en sortir seule. Elle a eu besoin d’un coup de pouce du destin. Pouce droit et pouce gauche. Les deux penalties ont été très généreux. La main de la capitaine Van Wyk et la faute suivie de l’exclusion de Nothando Vilakazi n’auraient vraisemblablement pas été sifflées dans un autre contexte, c’est-à-dire avec l’Espagne outsider. Ces décisions ont sauvé la Roja qui jusqu’à présent n’avait pas trouvé la solution, se procurant trop peu d’occasions nettes.

Jenni Hermoso et ses coéquipières ont écrit une page historique du football féminin en espagnol en remportant la toute première victoire de la Absoluta à un Mondial. Une bonne chose de faite mais qui ne doit pas faire oublier les grandes peines entrevues sur la pelouse du Havre. La réussite était avec elles contre l’Afrique du Sud. Pas sûr que cela se répète contre l’Allemagne.

François Miguel Boudet
@fmboudet

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