Porto – Oliver Torres : l’ancien crack de l’Atleti promis au Barça en conflit avec les 4-4-2

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Oliver Torres avait un destin tout tracé et devait représenter le futur de l’Atlético et de la Roja. Sauf qu’entre ses premières apparitions en pro avec les Colchoneros, des prêts et un transfert au FC Porto, le milieu de terrain tarde à confirmer tout son potentiel. Retour sur la trajectoire d’un footballeur différent qui doit se faire une place dans un football qui ne lui convient pas. Portrait d’un milieu créatif face au 4-4-2.

Oliver Torres devait être le nouveau crack à sortir de la Cantera après le Niño Torres et De Gea. C’est bien simple, avant qu’il ne foule les terrains de première division avec le maillot rouge et blanc, la simple évocation de son nom suscitait l’excitation dans les travées du Calderon. Il faut dire qu’Oliver a un talent monstre et une précocité éblouissante et ce depuis tout petit. Son prénom laissait déjà présager le football qu’il allait être. Alors que ses parents en avaient choisi un autre, son grand frère fan d’Olive et Tom fait pression pour que le petit porte le nom du héros de la série. Après quelques tractations tout est couché sur papier, Oliver Torres écrit déjà une partie de sa légende sans le savoir.

Proche du Barça avant d’embrasser une carrière avec l’Atléti

Oliver Torres voit le jour le 10 novembre 1994 à Navalmoral de la Mata en Extremadura. Une région pas vraiment connue pour avoir un football de qualité. Pourtant très vite, le futur milieu de terrain est attiré par le balompié. Une addiction qui a le don d’énerver sa mère, mais Oliver est passionné et surtout talentueux. Alors qu’il n’a que 11 ans, on lui propose de rejoindre une prestigieuse académie en Catalogne. Sa famille le soutien et Oliver plie bagage. Dans les colonnes de AS, il revient sur ce soutien sans faille des siens : « Depuis que j’ai 4 ans ma famille, mes parents comme mes frères, ont la certitude que je serais footballeur. Ils m’ont transmis cette conviction« .

Le choc est rude, Oliver est un footballeur de rue. Ses crampons ne sont jamais neufs et sa mère devient une experte en réparation. À Marcet, il est logé, nourri et s’entraîne sur de superbes terrains. Quand il est sur le pré, Oliver Torres est dans son élément et vit sa meilleure vie. Cependant son quotidien est rude loin de sa famille mais le milieu de terrain tient le coup. Oliver explique bien ce désarroi :« à Barcelone j’y suis resté pendant un an car ils prenaient soin de moi et se chargeaient de mes frais. Quand je jouais au football, j’étais la personne la plus heureuse du monde, mais la nuit je rentrais à la maison et il n’y avait ni mes frères ni mes parents, c’était difficile pour moi. » Quelques mois après il est encore repéré, cette fois c’est l’Espanyol et surtout le Barça qui s’intéresse à Torres. Sauf qu’Oliver aime un autre club, l’Atlètico. Aussi sur les rangs, les Colchoneros raflent la mise en 2008.

Crédits : ESPN

Dans un club instable et surtout pas vraiment reconnu pour sa formation, Oliver gravit les échelons rapidement et surtout en se faisant remarquer. Le quotidien est encore dur pour Torres, il vit avec sa soeur dans un appartement payé par ses parents qui ne roulent pas sur l’or. Le milieu de terrain qui porte fièrement le n°10 devient pourtant un footballeur élégant capable de tout changer sur une action. Souvent c’est le coup de foudre quand un entraîneur pose les yeux sur lui. C’est ce qui va se passer début 2012, 4 petites années après son arrivée à Madrid. Oliver joue avec les Juvenil, l’échelon en dessous l’équipe B. Le Cholo est en tribune et voit ce petit garçon, aux physique de pré-pubère et au visage de pompon dicter le jeu de son équipe. Alors qu’il n’est pas le plus grand ni le plus imposant, Oliver séduit Simeone qui le fait monter avec les pros sans passer par la case équipe B. Sur le banc pour le compte de la 36e et 37e journée, il ne joue aucune minute mais se fait déjà remarquer. Pourtant plus rien sera simple après cela pour le petit Oliver Torres.

Succès avec la Rojita de Lopetegui et les premiers échecs d’Oliver Torres

Pour clôturer sa saison 2011-2012, Oliver va encore mettre un peu plus son nom sur toutes les bouches en Espagne. Le milieu de terrain est membre de l’équipe des moins de 19 ans espagnole qui se déplacent en Estonie pour jouer l’Euro de la catégorie. Homme de base au milieu avec des joueurs comme Jesé, Deulofeu ou encore Alcacer, la Rojita entraînée par Lopetegui va soulever le trophée au terme d’une compétition dominée d’une main de maître. En finale, ils vont même s’offrir l’EDF d’Umtiti, Pogba ou encore Kondogbia aux tirs au buts. Oliver célèbre et sa réputation grandit en Espagne. On l’annonce dans les petits papiers du Barça ou certains voient en lui la relève de Xavi, rien que ça.

Credits : RTVE

Il est la futur pépite de l’Atléti, celui qui va faire passer un palier au club. Oliver Torres doit permettre d’amorcer la nouvelle transition du Cholismo. Hé oui, c’était déjà le sujet en 2012. Sauf que voilà, le milieu n’est pas un monstre physiquement et Simeone comprend qu’il n’a littéralement pas les épaules pour tenir dans le 4-4-2 rigoureux mis en place par le mister argentin. La rupture est brutale pour Oliver qui se retrouve broyé par la machine Atléti. Il joue 20 minutes du premier match de Liga version 2012-13 face à Levante puis il découvre la Segunda B durant de longs mois. On attend beaucoup de lui, mais Simeone le considère comme un joueur lambda qui doit d’abord montrer qu’il peut rendre des services tout de suite.

Début 2013, Oliver remonte avec les pro et joue quelques minutes, très souvent en fin de match. Il alterne le discret et les phases plus abouties. On se demande toujours si Oliver va réussir à confirmer son talent. Le 44–2 le bride, lui qui aime dicter le jeu doit faire la différence par la vitesse de déplacement, son gros point faible. Simeone lui concocte un entrainement physique personnel. L’Argentin met même en place un système de chasuble différent pour qu’Oliver soit repéré à l’entraînement et mieux servi lors des matchs. Mais rien n’y fait, Oliver parle un football différent de ses coéquipiers et ça se voit.

Oliver continue ses allers-retours, mais tout s’enflamme une nouvelle fois autour de lui. Face au Betis, en octobre 2013, Torres est titulaire pour la première fois. 13 secondes après le coup d’envoi, c’est lui qui ouvre le score et remet une pièce dans la machine. Ce but est le but le plus rapide de l’Atléti en championnat. Une nouvelle fois son nom est sur toutes les bouches, pour beaucoup, ce match est la première pierre de la carrière d’Oliver avec l’Atléti. Sauf qu’Oliver n’a pas de continuité et ne confirme pas lors des rencontres.

L’envol pour exister 

Le board rouge et blanc se réunit. Oliver Torres est garçon de grand talent mais l’effectif pléthorique et les exigences de résultats ne lui permettent pas de se faire une place. Le milieu doit grandir ailleurs, pour confirmer et revenir bien plus fort. Subvient l’option Villarreal qui colle parfaitement. Le sous-marin joue l’Europe, Marcelino joue en 4-4-2 dans un style proche à celui de Simeone mais l’effectif est moins pléthorique. Oliver rejoint le club en banlieue de Valence en janvier 2014 jusqu’à la fin de saison.

Il signe blessé, on lui laisse du temps puis ses premières minutes arrivent. Oliver Torres est titulaire face à Granada pour son premier match en jaune, son seul dans le cœur du jeu sous les ordres de Marcelino. Il enchaînera 4 titularisations mais cela coïncide avec la baisse de forme de Villarreal. 8 matchs plus tard, il retourne à Madrid dans une équipe championne d’Espagne. Oliver Torres n’a rien confirmé mais n’a pas déçu, le problème n’a pas avancé mais les sirènes du départ sonnent toujours.

Crédits : Marca

Au milieu des multiples propositions étrangères ou espagnoles, un club suscite l’intérêt d’Oliver. Porto sous l’égide de Lopetegui opère sa mue à la forte touche espagnole, le milieu n’hésite pas une seconde et rejoint celui qui l’a toujours compris footballistiquement. Le duo va encore une fois, bien s’entendre. Dans un club qui n’a jamais autant parlé espagnol, Olivier arrive avec son coéquipier de l’Atléti Adrian Lopez mais surtout une flopée d’insulaires notamment : Campana, Cote ou encore Tello et va trouver enfin un environnement favorable.

Oliver Torres, protégé de Julen Lopetegui

Ce qui change avec ces dernières expériences en club est l’attitude avec laquelle le Porto de Lopetegui va jouer ses matchs. Les Portugais veulent avoir le ballon ce qui va causer des tords au futur sélectionneur espagnol. Mais le 4-3-3 et cette volonté d’avoir le ballon permet à Oliver de montrer enfin l’étendu de son talent sur la durée. Plus haut sur le terrain, plus prêt de la surface et surtout allégé de travail défensif, Oliver va vivre sa meilleure saison en club. Le milieu de terrain a 20 ans et vient de jouer une quarantaine de matchs et de marquer 7 buts dans une équipe qui joue la Ligue des champions.

Crédits : El Confidencial

Lopetegui est dithyrambique sur son milieu de terrain et multiplie les éloges pour qualifier le talent de son petit meneur de jeu. « Il est ambitieux et intelligent. Jusqu’où peut-il aller? Cela dépend de lui. Il n’y a pas de limite à son potentiel. «  Julen poursuit : « C’est un milieu de terrain qui comprend très bien le jeu et qui a beaucoup de qualités techniques, même s’il n’oublie pas la phase sans ballon. Cela vous donne l’impression de vouloir toujours être meilleur et, comme votre tête est très bien fournie, il semble que cela va continuer ainsi » . Les deux se comprennent parfaite et Oliver Torres reconnait volontier que le futur patron de la Seleccion a eu un impact plus qu’important sur sa carrière

Même les critiques sur l’activité de Torres, Lopetegui n’en a que faire : « Les joueurs doivent être critiques et réceptifs. Ensuite, nous avons besoin de qualité technique pour avoir le ballon. Et l’idéal est qu’ils aient un physique, mais la nuance technique est importante. Plusieurs fois, les joueurs sont étiquetés. Mais combien courent plus que Xavi? Si vous analysez les kilomètres parcourus, le joueur qui court le plus dans notre équipe est Oliver. La première condition est de vouloir. Ceux qui disent qu’Oliver est un artiste, c’est parce qu’ils ne le connaissent pas. Il a une âme. Il veut être footballeur. «  Encore une fois, il semble que la route vers la gloire est de nouveau ouverte pour Oliver et le parallèle avec Xavi énoncé.

Nouvelle déception à l’Atletico avant un retour à Porto

À l’été 2015, Oliver est devant un choix cornélien. Porto veut le garder et les supporters sont fans de leur milieu espagnol mais Oliver rêve toujours d’exploser à l’Atleti et les socios des Rojiblancos attendent le retour du milieu prodige. Au terme d’un choix qui sera cependant rapide, Oliver retourne à Madrid avec son étiquette de crack toujours autour de son cou. Sauf que cette fois, il a confirmé dans un grand championnat, il ne peut plus être qu’un second couteau.

Maintenant joueur avec un certain statut, Oliver débute dans la peau d’un titulaire cette saison 15-16 avec son maillot adoré. À droite du fameux milieu de terrain avec 4 interiors mis en place par l’entraîneur argentin. Comme l’explique Jeremy Valleyre, expert des matelassiers et membre de @AtletiFrance, les débuts d’Oliver sont encourageante mais très rapidement, ses limites dans le style choliste ressurgissent. Il joue à contre temps, à contre emploi et sombre physiquement. Il ne convient pas à ce que Simeone voudrait et il est souvent pointé du doigt par son coach et mis au banc. Alors qu’il est titulaire lors des 5 premières journées, son temps de jeu fond comme neige au soleil.

Crédits : Goal

Rien n’y fait, Oliver ne rentre pas dans le moule choliste. Jeremy Valleyre revient sur cette non compréhension entre les deux : « El Cholo, ce qu’il voulait c’était un Koke, un Saul, un Arda Turan, mais il avait leurs qualités techniques sans le coté costaud ». Pour ne rien arranger, son entraînement physique pour le rendre plus tonique sur les premières touches lui fait subvenir quelques blessures. Oliver finit cette saison bouilli et surtout totalement hors du coup. Il sait qu’il doit partir pour s’épanouir. Alors qu’Oliver Torres devait représenter l’évolution du style de Simeone, il montre surtout les limites de l’Argentin hors de sa méthode préférentielle. Encore une fois, Porto se présente et rafle la mise en 2016.

Encore et toujours ce foutu 4-4-2 

À Porto, la révolution espagnole a pris fin, Lopetegui est parti et de nombreux transfuges made in Liga ont aussi plié bagages. Oliver retrouve encore Adrian Lopez et cette fois c’est Nuno qui est sur le banc. Adepte d’un 4-4-2 diamant mais aussi d’un 4-3-3 plus classique, le coach portugais utilise surtout le petit espagnol comme la pointe la plus haute de son losange ou en tant que récupérateur, et ça lui réussit bien. Très souvent titulaire en championnat, les supporters des bleus retrouvent un joueur enthousiasmant, à l’aise dans les petits espaces sachant faire jouer les autres mais aussi adepte des numéros de solistes magnifiques. Bien sécurisé par des joueurs comme Herrera, il semble enfin épanoui. Moins protagoniste en Ligue des champions, Porto finit tout de même 2e en Liga Nos et Torres y est pour beaucoup.

Crédits : Maisfutbol

Sauf que cette idylle qui semblait si parfaite se casse une nouvelle fois, Nuno est délogé par Wolverhampton et Conceição l’ancien de Nantes rejoint Porto. Fini le 4-3-3 el’écosystème favorable pour Oliver, retour d’un 4-4-2 bien plus strict et une volonté d’avoir des joueurs travailleurs au milieu. L’Espagnol qui est devenu l’un des achats les plus conséquents des Portugais se retrouvent de nouveau en situation d’échec. Dans cet exercice 17-18, Oliver va moins jouer et surtout être descendu quelques fois par son entraîneur en conférence de presse. Rien de méchant, Torres a déjà connu ça avec Simeone, mais il est de nouveau mis devant ses faiblesses. Oliver ne se fait pas assez violence à la récupération et passe derrière des joueurs plus à même d’être des box to box.

Pourtant Oliver continue d’apprendre et de se rapprocher d’un Iker Casillas qui deviendra un de ses modèles et son grand frère au Portugal. Porto soulève le titre en 2018 et Oliver n’est qu’un joueur de complément. Il assiste du banc à la gifle encaissée face à Liverpool en huitième aller à domicile et joue le retour entièrement. Depuis pas mal d’eau a coulé sous les ponts et un nouveau Oliver Torres semble apparaître, pour notre plus grande joie.

Enfin l’envol pour Oliver Torres ?

La bascule se fait en octobre, face à Feirense. Il profite de l’absence d’Herrera pour réussir un match sensationnel dans un secteur qui n’est pas son préfère habituellement : l’abattage. Parfait à la récupération, Oliver va toucher un nombre de ballons incroyable partout sur le terrain. Une activité saluée par la presse et son entraîneur. Ce match est une bouffé d’oxygène pour lui. Cette première titularisation cette saison va en amener beaucoup d’autres et dans le 4-4-2 fétiche de Conceição. Toujours pas titulaire indiscutable, il a pourtant le mérite d’être passé de simple joueur de complément à concurrent direct à la paire Herrera-Danilo.

Alexandre Ribeiro de @Trivela explique le statut de l’Espagnol : « Il a beaucoup joué avec la blessure de Danilo et parce qu’avec le championnat, les Coupes, et la LDC, Porto a beaucoup enchaîné les matchs. Mais si demain Porto joue une finale de LDC au complet, sans blessés, il y a peu de chances qu’Oliver soit titulaire ». Titulaire trois fois tout de même en phase de groupe de la Champion’s mais sur le banc pour les huitièmes, l’Espagnol devrait pourtant être titulaire pour le match aller de la revanche face à Liverpool en quart de la Coupe aux grandes oreilles. La faute à la suspension d’Herrera mais la chance enfin de montrer à l’Europe et à son coach que le nouveau Oliver est capable d’être au niveau dans un 4-4-2. S’il est devenu enfin un joueur fluide, capable de bien faire vivre le ballon, il est aussi capable d’être travailleur à la perte et plus seulement ce joueur unilatéral qui a besoin d’un certain écosystème pour réussir.

Crédits : AS

À l’aube de ses 25 ans, Oliver Torres joue gros, il peut encore devenu le crack attendu et être la relève de Xavi comme annoncé ou devenir simplement un bon joueur en championnat. La bascule passe par de bonnes performances lors de grandes échéances, à lui de saisir sa chance. Ce quart de finale en Angleterre en est une. Il a confié à EFE qu’il serait capable de tout pour rejoindre la sélection, même de tondre la pelouse ou de ranger les chasubles pour y arriver. Mais Oliver n’a pas besoin de tout ça, il a juste besoin d’être bon sur le pré, et ce régulièrement.

Benjamin Bruchet

@BenjaminB_13

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