Il y a des joueurs qui réussissent plus facilement que d’autres, comme s’ils étaient prédestinés à fouler les pelouses de première division et faire lever les foules. Santi Comesaña semble faire partie de cette caste de joueurs. Il y a 4 ans il signait en Segunda B, et cela semblait déjà un aboutissement pour un garçon qui n’est jamais passé par un grand centre de formation. Pour le compte de la 27e journée, Santi va pourtant être titulaire sur la pelouse du Camp Nou, et c’est une évidence. Dans un rôle déterminant de sentinelle, celui qui découvre la Liga cette saison a déjà mis tout le monde d’accord en Espagne. Retour sur le parcours linéaire d’un garçon qui rêve d’être une idole dans le club qui lui a permis de vivre du football.
Le Rayo vit une saison compliquée, c’est une certitude. Englués dans la zone rouge depuis le début de saison, les hommes de Michel ne se renient pourtant pas et continuent de croire en leur chance. Les essais et les expérimentations ont été nombreux mais un joueur n’est jamais sorti du onze ou presque : Santi Comesana. C’est bien simple, il fait partie du top 5 des joueurs les plus utilisés dans l’effectif du Rayo. Pourtant Santi est tout jeune et évolue dans un rôle qu’il découvre. Pas vraiment une sentinelle pure, il est le point d’encrage du Rayo et il touche énormément de ballons. Pour ne rien arranger, le joueur découvre le haut niveau et ne semblait pas préparé à y évoluer un jour. Mais rien n’y fait, Santi Comesaña est un crack et réussit une très bonne saison. Retour sur la formation d’un joueur résolument différent.
L’enfant de Galice sur les traces de Trashorras
Dans cette région montagneuse qui borde le Portugal, de nombreux footballeurs sont nés et ont été formés. La dernière grande idole du Rayo qui représentait une certaine manière de jouer au football est Galicien : Roberto Trashorras. Rapidement, Santi rejoint l’ED Val Miñor un bon club formateur de la région qui est en lien avec le Celta, le club phare actuellement de Galice. De nombreux joueurs sont passés par cette entité avant de rejoindre des clubs plus importants : Thiago Alcantara, Rodrigo Moreno ou encore Rafinha.
Santi aura une croissance tardive ce qui retardera son éclosion. Pourtant on remarque très rapidement son style et son intelligence. Comesaña aime avoir le ballon, le toucher, le faire vivre et même s’il sait dribbler il semble préférer la passe. Au vu de sa petite taille, on le place sur une aile. Il s’épanouit et rapidement il rattrape son retour de croissance, Santi dépasse maintenant le mètre 80. Rapidement même il approche le mètre 90. Le poste d’ailier n’est plus vraiment adapté à son physique longiligne. On le replace en tant que numéro 10 dans un rôle de meneur de jeu. Sans appel du Celta ou du Depor, Santi rejoint alors le CD Coruxo en Segunda B. Ce transfert ne fait pas beaucoup parler et on ne s’attend pas à ce qu’il joue beaucoup, du moins au début.

Rapidement pourtant il séduit son coach : Jorge Saenz. Santi a un truc, c’est indéniable. Une élégance qu’on retrouve de moins en moins chez les footballeurs. Malgré qu’il soit ballotté un peu partout devant, Comesaña répond présent et enchaîne les bonnes performances. Mieux encore, il réussit même à faire trembler les filets plusieurs fois. La presse locale s’emballe et lâche le mot « perle » pour qualifier ce petit joueur qui fait des étincelles dans une division très compliquée. On est en 2016, la carrière de Santi est en train de basculer.
Santi Comesaña, un joueur différent
Pourtant Santi ne sent pas ce qui est en train de passer. Après une saison pleine avec notamment 38 matchs joués, il quitte Coruxo et s’envole pour le Rayo alors en Segunda. Il s’est confié à UnionRayo sur son évolution et sa progression. « Les choses vont si vite que vous ne vous assimilez pas … Quand j’étais dans le Val Miñor, je n’imaginais pas venir ici. J’étais dans une carrière peu connue. Aussi bien que l’année dernière, je ne m’attendais pas à jouer l’année suivante à Segunda B. Je ne m’attendais pas à jouer à Coruxo. Si j’arrivais à un tiers, j’aurais pensé que c’était quelque chose de bien. Ensuite, j’ai pris le Rayo et tout se passe si vite que vous ne le remarquez même pas. Vous ne savez même pas ce que vous faites. On dirait qu’hier, je quittais Val Miñor. «
Un transfert un peu surprenant surtout que le Celta s’était manifesté pour faire signer le jeune offensif galicien. Cependant le Rayo suivait Santi depuis plus longtemps et ce transfert s’est donc fait naturellement. Son entraîneur au Coruxo FC ne tarit pas d’éloges sur un joueur qu’il n’a côtoyé que le temps d’une saison. « Santi me surprend par son travail quotidien, il a une progression continue qui se reflète tous les dimanches. » Javier Villaverde ou ‘Villa’ un ancien joueur de football maintenant agent est tout aussi élogieux à l’évocation du nom de Santi. « En tant que personne, c’est un garçon timide et calme, il échappe au bruit, l’humilité de ses parents et de ses frères a beaucoup à voir avec Santi. »
Quand Santi signe au Rayo en 2016, il a 20 ans. Un âge tardif pour arriver dans le haut niveau mais un retard qui aura permis au milieu de se structurer mentalement avec sa famille sans se déraciner de sa région natale. Quand il rejoint Madrid on se demande s’il va jouer avec la B ou avec les pros. Rapidement encore, il va gravir les échelons. Cependant au début on l’accuse d’être un bon maladroit voit lent. Il n’a pas un démarrage rapide mais il a de longues jambes et une très bonne première touche. Et le plus important ? Il réfléchit constamment.
Santi Comesana, l’ami des légendes du Rayo
Logiquement à son arrivée, il rejoint la réserve Rayista. Elle est alors entraînée par une légende du club : Michel. Rapidement pourtant il se montre et multiplie les aller-retours avec les pro. Il joue même, quelques fois des bouts de matchs mais le plus important est ailleurs. Il rencontre un joueur fondamental pour son avenir et son évolution. Comme il l’explique à Faro de Vigo : « Ils m’aident tous et se soucient de moi. Évidemment, avant d’arriver, j’avais la référence de Roberto (Trashorras), qui était au Celta et qui est un joueur énorme, une sommité. Ensuite, jouer à ses côtés est beaucoup plus facile, tout est beaucoup plus simple. En outre, c’est quelqu’un qui vous aide toujours, vous dit ce que vous devez faire et que vous apprenez. » Le parallèle entre les deux s’écrit logiquement tant les deux se ressemblent physiquement et sur le terrain.

En février tout bascule. Ruben Baraja est démis de ses fonctions et c’est Michel qui prend en charge l’équipe fanion du Rayo. Quelques semaines après, logiquement, Santi Comesaña devient un joueur de l’équipe pro à part entière. Les deux s’entendent très bien et trois générations de milieu de terrain vont se côtoyer. Michel est LE plus grand joueur du Rayo, Trashorras représente la dernière période dorée du club et Santi le plus grand talent du club avec Beltran. Pourtant Comesaña a déjà eu des soucis avec ses entraîneurs mais ici tout se passe bien. Mieux encore, son côté hargneux sur le terrain plaît à son coach.
Cependant Santi n’a pas encore été reculé sur le terrain. Dans le 4231 mis en place par Michel, il est la pointe haute du triangle au milieu. Facile balle au pied, bon devant les bois et décisif même sous pression il va participer activement à la très bonne campagne 17-18 des Madrilènes en Segunda. Alors qu’il semblait condamner à rester en D2, le Rayo se remet à rêver d’une montée. À la fin de la saison, Vallecas explose. Rayo retrouve la Liga au terme d’un superbe finish, Michel a réussi sa mission et écrit encore plus sa légende. Santi n’attire cependant pas les regards qui sont braqués sur la pépite Fran Beltran.
Une montée et des nouvelles responsabilités
En mars 2018, juste avant la montée il était revenu sur le parallèle entre lui et Trashorras : « Etre idole de Vallecas serait bien et être capitaine comme lui. Ce ne serait pas mauvais de suivre ses traces, d’être comme lui ou du moins d’essayer de jouer comme lui. » Lors de l’accession en première division, on attend logiquement plus de Beltran que de Santi sauf que le premier va rejoindre le Celta dans un fracas retentissant. Santi Comesaña se retrouve cette fois avec tous les regards braqués sur lui. Une situation qui ne lui fait pas peur.
A OndaMadrid, Santi s’est confié sur son nouveau rôle et ses nouvelles attentes. « Je ne me considère pas comme le leader du Rayo . Ici il n’y a personne d’indiscutable. Maintenant nous sommes très bons. Personnellement, je joue bien . L’année dernière, j’ai commencé comme ça et j’ai eu un petit creux. Je me suis simplement détendu et j’ai commencé à jouer moins. Cette année, je ne peux pas le faire. Je dois être au top de chaque entraînement pour continuer à être titulaire. Je n’ai pas l’intention de faire oublier Fran Beltrán . Il a fait un temps, nous avons été promu en Liga avec lui. C’était l’un des piliers de la saison et je n’ai pas l’intention d’effacer son nom. J’essaie d’aider l’équipe à mon tour et quand l’entraîneur décide. »
À l’aube de cette 27e journée et de ce choc de gala face au Barça, Santi est pourtant le leader technique de cette équipe et le seul joueur indéboulonnable au milieu. Reculé sur le terrain pour palier numériquement la départ de Beltran, il a apporté son propre style dans un poste exigeant. Epaulé physiquement par Imbula ou Mario Suarez, Santi est le catalyseur d’une équipe qui essaye de bien jouer au football en traitant du mieux possible la gonfle. Pour El Pais, la perle est revenu sur ce style : « Je pense que c’est très agréable de commencer à identifier une équipe humble comme le Rayo avec une idée de jeu aussi marquée, les gens aiment nous voir essayer de faire jouer le ballon, même si nous faisons parfois des erreurs. La preuve, c’est qu’ils étaient avec nous quand nous n’avions que onze points et qu’il semblait que nous étions morts. »
Outre son premier modèle Trashorras, Santi Comesaña va affronter lors de cette 27e journée un de ses autres modèles sportifs : Sergio Busquets. Rien ne dit qu’il suivra ses traces et deviendra un joueur de renom ou s’il fera comme Trashorras et deviendra une légende du Rayo mais une chose est sûre : Santi est un joueur de grand talent et beau à voir jouer. L’avenir lui appartient.
Benjamin Bruchet
@BenjaminB_13