Pour la 4e fois consécutive, le Barça a vaincu le Real Madrid à Santiago-Bernabéu. On s’attendait à un sursaut merengue après l’élimination en Copa del Rey mercredi dernier mais les Blaugranas ont étouffé leurs rivaux qui n’ont jamais été en mesure de contester l’hégémonie culé. Trois joueurs se sont particulièrement démarqués lors de ce Clásico : Arthur Melo au milieu et la charnière Gerard Piqué-Clément Lenglet. Ils ont eu les clefs du match et ont fermé la porte à double tour.
Ce n’est certainement pas le plus grand Barça de l’Histoire mais il a au moins le mérite de concrétiser ses temps forts et de faire le dos rond dans ses temps faibles. Même en ayant partagé la possession de façon presque équitable (48.4% / 51.6%), les Blaugranas n’ont pas tremblé à Santiago-Bernabéu, renvoyant le Real Madrid a ses doutes avant le 1/8 de finale retour de Ligue des Champions contre l’Ajax mardi prochain. La Chances Map de @Footenstats montre bien la domination du Barça qui aura un pourcentage d’expected goal presque deux fois supérieur au Real.
Si Ernesto Valverde peut être légitimement critiqué pour sa quête inaltérable de l’équilibre et certaines compositions, il ne faut tout de même pas oublier qu’il reste l’un des meilleurs tacticiens espagnols à l’heure actuelle. En faisant évoluer son XI de départ, Txingurri a pour ainsi dire gagné le match avant le coup d’envoi. Reste désormais à savoir s’il reconduira cette équipe sur la durée avec ce bloc bas et s’il parviendra à corriger ce défaut de gérer le match au lieu de le plier comme on a pu le voir samedi soir.
Arthur titulaire, la réponse par le jeu invisible
Décision majeure de Valverde : titulariser Arthur Melo et replacer Sergi Roberto au poste de latéral droit. Lors du Clásico en Copa del Rey mercredi dernier, l’Espagnol avait débuté au milieu tandis que Nélson Semedo était latéral droit. Le Real Madrid et notamment Vinicius Jr s’étaient engouffrés dans la brèche et la première période avait été un enfer, avantage énorme que les Vikingos n’avaient pas su transformer au tableau d’affichage. Cependant, voir un brésilien qui découvre l’Europe bouleversé autant le jeu d’un géant comme le Barça en dit long sur son architecture tactique …
Avec Arthur, le Barça a dicté le rythme du match. Toutes proportions gardées, on retrouve de l’intelligence de Xavi Hernández dans les déplacements et la lecture du jeu du Brésilien. Surtout, sa présence en position de relayeur est essentielle pour la projection offensive culé. Débarrassé des tâches principalement défensives (repli, fermeture d’angles de passes), Iván Rakitic a été le grand gagnant de la titularisation d’Arthur. Le Croate s’est retrouvé dans une position préférentielle, celle de créateur capable en une passe ou une accélération de déstabiliser l’adversaire. Avec davantage de mouvements devant lui, Sergi Roberto s’est lui aussi libéré. Ce n’est pas un hasard si le seul but du match est venu d’eux. D’un point de vue statistique, Arthur n’a pas été le jeu le plus sollicité (54 ballons touchés, 9e joueur de champ) mais son travail invisible a été prépondérant car, contrairement à Rakitic, c’est sa fonction première sur le terrain.
Piqué-Lenglet : une main de fer dans un gant de béton armé
Si sur le plan offensif, ce Clásico ne restera pas dans les mémoires, en ce qui concerne l’aspect défensif en revanche, la charnière Piqué-Lenglet a marqué ce 4e opus de la saison de son empreinte. Le défenseur central espagnol s’est fait plaisir cette semaine. Entre deux punchlines sur la situation en Catalogne, l’ex-international a livré un partidazo. C’est simple, Piqué a quasiment tout réussi : 64 ballons touchés, 2 tacles, 3 interceptions, 14 (!) dégagements, 3 blocs, 1 duel aérien pour seulement 1 faute et 1 perte de balle. Mieux, son coéquipier français s’est mis au diapason : 55 ballons touchés, 3 tacles, 2 interceptions, 8 dégagements, 4 blocs, 3 duels aériens, aucune perte de balle et à peine 2 fautes. Dans sa poche ? Un Benzema incapable de se mettre dans une position préférentielle.
Remplaçant de Samuel Umtiti en début de saison, Lenglet a profité de la blessure du champion du monde et taulier de la défense blaugrana la saison dernière pour rééditer le coup de Séville : arriver sur la pointe des pieds avant de mettre tout le monde d’accord. Preuve que son apprentissage se passe très vite, il s’est permis le luxe d’aller mettre un coup de coude à Sergio Ramos sur un corner offensif. Certes, ce n’est pas vraiment joga bonito, mais cela démontre sa confiance et sa puissance, surtout dans un match comme ce Clásico où il n’a eu à défendre avec beaucoup de profondeur derrière lui, son point perfectible, l’attaque merengue se cantonnant à lancer Vinicius face à Sergi Roberto et cherchant Benzema en point d’appui.
La titularisation de Gareth Bale, qui a tout de la faute professionnelle, ainsi que les entrées sans saveur de Marco Asensio et Isco ont été rédhibitoires pour le Real Madrid, même face à un Barça qui, à défaut d’être flamboyant, a été lucide et sûr de ses forces. Le plus inquiétant pour les Vikingos, c’est qu’il n’en a pas fallu davantage pour les vaincre. Santiago Solari en sera quitte pour quelques nuits blanches avant de faire tapis en Ligue des Champions. Il y a une semaine, le Real Madrid avait encore tout à gagner; désormais, il a tout à perdre.
François Miguel Boudet
@FMBoudet