Bien que le dénouement soit prévu pour 2021, l’élection présidentielle au FC Barcelone a d’ores et déjà commencé. Mais plus qu’un nouveau président, le Barça s’apprête à entrer dans une nouvelle ère : celle de l’après Leo Messi. Une sacrée pression pour le nouvel élu. Premier à se présenter face à ce défi : Victor Font. Et il pourrait bien être accompagné d’un atout de poids : Xavi.
L’après Leo Messi, justement, Victor Font en parle. Premier candidat déclaré à la présidence du club blaugrana, ce chef d’entreprise fondateur de la société de conseil en telecom Delta Partners et aussi actionnaire du journal catalan ARA, veut révolutionner la manière de gouverner le Barça actuel. Pour lui, le modèle est dépassé. Pire: il pourrait mener le FC Barcelone à sa perte. Pour faire réagir les socios, il n’hésite pas à exprimer sa crainte de l’avenir en évoquant un possible nouveau cas AC Milan avec le club culé : « Ou nous révolutionnons le modèle de gestion ou nous deviendrons le nouveau Milan » expliquait-il à La Vanguardia en février dernier. Devenir le nouveau Milan? Comprendre : ne plus disputer la Ligue des Champions. Le 31 janvier, Victor Font a lancé sa campagne. Bien en avance probablement pour deux raisons : se faire connaitre et surtout sécuriser sa place en cas d’élection anticipée.
Xavi et Joan Vilà en soutiens ?
Le discours du candidat est simple : il veut s’appuyer sur « la meilleure génération de footballeurs de l’histoire » pour prendre les décisions sportives. Autrement, il souhaite s’entourer de la Pep Team et sur ce point Victor Font a déjà des arguments. Si Xavi Hernández ne s’est pas encore exprimé officiellement, il est selon l’homme d’affaires le candidat parfait pour le poste d’entraîneur et des indices laissent supposer que le candidat aura bien l’appui de l’ancien capitaine du Barça. Par exemple, un « j’aime » qui n’est pas passé inaperçu sous la vidéo Instagram d’ouverture de campagne du candidat, mais aussi et surtout la création sous la tutelle de Joan Vilà, ex-directeur de la méthodologie du Barça, d’un logiciel de football. Un outil qui permettrait d’améliorer la compréhension tactique et technique de joueurs.

Joan Vilà, que la direction actuel du Barça n’a pas souhaité prolonger l’année dernière, reste pour l’éternel numéro 6 catalan un élément essentiel des succès blaugrana. Il n’a d’ailleurs que très peu apprécié cette décision de la part de la direction sportive : « (sur le départ de l’ex directeur de la méthodologie) Ça m’inquiète! C’est très fort que Joan Vilà ait du partir, c’est la personne avec la plus grande connaissance du jeu de position au Barça. »
« J’aime beaucoup moins le Barça actuel par rapport au Barça beaucoup plus ancré idéologiquement de Guardiola ou Tito. Cette idée a été diluée ». VICTOR FONT, LA VANGUARDIA
Combat de philosophies ?
L’enjeu n’est-il pas justement ici ? Victor Font semble prendre le pari d’un retour aux bases : croire de nouveau en la Masia et s’appuyer à nouveau sur la philosophie de Johan Cruyff qui paraît bien s’être délitée d’après le candidat : « J’aime beaucoup moins le Barça actuel par rapport au Barça beaucoup plus ancré idéologiquement de Guardiola ou Tito. Cette idée a été diluée. J’aime que nous soyons compétitifs, que nous ayons avec nous le meilleur de l’histoire et qu’il reste encore des joueurs de la meilleure équipe de l’histoire. Nous continuons de gagner mais le football que nous pratiquons est beaucoup moins divertissant que ce que nous faisions par le passé. »
Cette vision est partagée par une partie des supporteurs mais pas forcément par les décisionnaires lorsqu’on sait que la décision de prolonger Ernesto Valverde a été grandement saluée dans les allés du Camp Nou. En décembre, un sondage réalisé par le journal Mundo Deportivo sur 300 socios indiquait que presque 80% des interrogés souhaitaient une prolongation du coach en place. Souhait exaucé en février. Les socios semblent donc goûter pour l’instant aux nombreux changements de cap entrepris par la direction sportive actuelle, qui semble de plus en plus s’éloigner du jeu de position de Joan Vilà.
Un marche trop haute ?
Si Victor Font a des arguments à faire valoir dans cette campagne, il a également des freins et non des moindres. Peu connu, il a de plus élu domicile à Dubai. Certainement un handicap au moment de convaincre les Catalans qu’il est à même de représenter les valeurs de la région.
Mais son plus gros souci restera sans doute ses adversaires, forcement concurrent d’un candidat dans la lignée de la présidence actuel. Il devra aussi se battre contre un palmarès qui reste important sous l’ère Josep María Bartomeu, bien qu’à nuancer par les performances du grand rival madridista en Ligue des Champions. Lui même le reconnaît : le Barça reste compétitif et toujours favori dans toutes les compétitions, ce qui suffit amplement à une partie des socios. D’ailleurs, il n’est pas à exclure, si succès important il y a cette année pour les Culés, de voir la direction demander des élections anticipées afin de surfer sur les résultats récents et prolonger la politique entreprise comme cela fut le cas lors de la transition Sandro Rosell-Josep Bartomeu.
En attendant de connaître le dénouement de cette élection, d’autres candidats seront bien sûr en course pour le poste suprême. L’ancien président Joan Laporta n’est par exemple jamais très loin lorsque le poste est mentionné. Mais il y a fort à parier qu’autant dans les urnes que dans les tribunes et les lieux de rencontres, le combat soit autant idéologique que politique.
Tracy Rodrigo
@tracy_rdg