Arrivés cet été, Rodrigo et Santiago Arias devaient amorcer encore un peu plus la mue de l’Atlético et de son Cholismo. A l’aube d’un Eterno Derbi qui s’annonce déterminant pour la suite de la saison et juste après la fermeture du mercato hivernal, il est intéressant de revenir sur l’adaptation de l’Espagnol et du Colombien, déjà indispensables pour le présent de l’Atleti et déterminants pour son avenir.
Ils étaient 5 cet été. Des joueurs de tous horizons qui devaient amorcer le renouveau de l’Atleti et l’installer durablement dans la caste des géants européens. Santiago Arias, Rodri, Thomas Lemar, Gelson Martins et Nikola Kalinic : voilà les solutions apportées aux Colchoneros pour répondre aux problèmes présents et amorcer le renouveau d’un effectif vieillissant en défense et inexistant sur les côtés. Gelson est déjà parti, Lemar et Kalinic ne jouent que pas intermittence et l’arrivée d’Álvaro Morata semble verrouiller l’avenir du Croate. Cependant, ils sont deux à s’être rendus déjà indispensables ou presque. Retour sur les premiers mois d’Arias le latéral droit et Rodri le milieu défensif surdoué sous le maillot des Rojiblancos.
Rodri, pierre angulaire de l’Atlético
Transfuge estival verrouillé dès janvier avec Villarreal, Rodri (ou Rodrigo comme on veut) était la recrue la plus intéressante du mercato estival de l’Atlético. Même l’arrivée de Gelson n’a guère émoustillé l’afición, au contraire de l’annonce de l’arrivée de la sentinelle élégante qui joue le maillot dans le short. Filiforme, le milieu défensif, qui a été formé à l’Atleti, s’est révélé à Villarreal dans une petite ville et un club à la fois familial et ambitieux. Le mix parfait pour progresser en somme. L’année passée, sa première en Liga, il a mis tout le monde d’accord et a tenu seul l’entrejeu du sous-marin jaune, portant même sur ses épaules un Trigueros loin de son niveau. Son arrivée dans le coeur du jeu colchonero posait plusieurs questions. Serait-il au niveau ? Comment intégrer une vraie sentinelle dans un milieu à 2, tout en gardant l’équilibre si caractéristique du Cholismo ? Serait-il capable d’absorber la préparation physique du Profe Ortega, sorte de rite d’initiation pour intégrer les plans de Diego Simeone ?
Sa première sortie a rassuré tout le monde sur le niveau de ce garçon grand qui joue tête levée mais semblait a priori pas assez costaud pour se tenir droit. Lors de la SuperCoupe d’Europe face au Real Madrid, l’ancien de Villarreal a régalé dans un schéma qui s’apparente à un 4-3-3. En position de milieu reculé, il a attiré les ballons et été le point de repère de toute l’équipe. Malgré cette bonne prestation, la place de Rodri dans l’entrejeu de l’Atlético n’est absolument pas verrouillée. Sur les 6 premières journées de Liga, la sentinelle s’assoit sur le banc 4 fois et voit du bord du terrain la défaite des siens face au Celta. Sa place dans le XI, Rodri la sécurise lors de l’eterno derbi comptant pour la 7e journée. L’Atleti accroche un 0-0 dans le pur style Cholista et le natif de Madrid sort un partidazo magnifique. Depuis, Rodri n’a plus raté un match de championnat. Mieux : il devient un titulaire fixe, sauf contre… Villarreal où il ne dispute que la 2e période.
Arias, des débuts compliqués mais un style vital pour l’avenir
Contrairement à Rodri qui a très vite convaincu, Santiago Arias a eu bien plus de mal à s’installer durablement sur le côté droit de la défense de l’Atleti. Le Colombien, transfuge du PSV, n’était pas la signature la plus sexy mais elle s’apparentait à un vrai bon coup. L’avenir du côté gauche étant, pour un temps, sécurisé avec Lucas Hernández et Filipe Luis, le pendant à droite n’avait pas vraiment de doublure et Juanfran n’est plus tout jeune pour tenir toute une saison. Solide défensivement mais surtout utile offensivement et doté d’un gros volume de jeu, Arias semblait être le joueur qu’il manquait pour continuer de dynamiter la banda derechas et rajouter des armes au jeu des Indios.

D’abord remplaçant, le colombien a attendu début octobre et le match de Ligue des Champions face au Club de Brugge pour voir son nom enfin apposé comme titulaire. Ce retard à l’allumage n’est pas une surprise, Rodri étant un OVNI (aucune recrue ne s’est imposée aussi vite avec El Cholo, y compris Antoine Griezmann). Tous les joueurs arrivant à l’Atleti mettent quelques semaines à intégrer et digérer la préparation physique. En plus, le latéral s’est blessé, ce qui a retardé encore un peu plus son intégration. Cependant, dès qu’il a été au top physiquement, Arias a laissé apparaître ce pourquoi il était là et comment il peut faire du bien à sa nouvelle formation. Depuis fin octobre, il n’a raté qu’un match de Liga (face à Séville), preuve de son importance dans l’esprit de Simeone.
Mais quelle plus-value sur le terrain ?
Dans le jeu, Rodri est indispensable parce qu’il apporte énormément sur plusieurs points. Tout d’abord quand l’Atleti relance, souvent il descend pour s’intercaler entre les deux défenseurs et donc générer un surnombre pour trouver un homme libre, souvent Thomas Partey qui peut ensuite faire parler sa puissance ou sa qualité de passe pour casser les lignes. Ensuite, quand les Colchoneros jouent haut et s’installent dans le camp adverse, Rodri joue le rôle d’équilibreur. Il compense, bouge, se positionne toujours dans un endroit libre pour offrir une ligne de passe et ne pas faire mourir le ballon. Son association avec Thomas est intéressante et s’améliore de match en match. Les deux ont des filières différentes et se renforcent quand ils sont associés. Cela fait un moment qu’on a pas vu l’Atleti sans Rodri mais il est certain que son absence se ferait ressentir dans le jeu des rouges et blancs.
De son côté, Arias n’est pas aussi fondamental pour la réussite de l’Atleti. Néanmoins, son poste et son style répondent à un manque criant chez les Indios. Dans le jeu, maintenant que Simeone veut le ballon et progresser avec, il doit disposer de latéraux capables d’apporter le surnombre en phase offensive. Juanfran n’a plus les jambes pour multiplier les appels et souvent il se cantonne à faire le boulot défensif, sa principale force. Arias, lui, est totalement différent. Débordant d’énergie, le Colombien attaque son côté, propose des appels et demande constamment le ballon. Bien sûr, il a des manques et des ratés par moments. Cependant cette attitude est salutaire pour un Atlético qui n’est pas rodé offensivement et devient bien souvent prévisible et donc inoffensif. Quand Arias est là, le jeu rojiblanco gagne en largeur et est bien plus aéré. On a vu l’Atleti sans lui et ce n’était pas fameux.
La mue de l’Atleti prendra du temps et souvent quand on regarde les Colchoneros, on est frappé par les manques et les incohérences devant. Si le Cholo a élevé la défense à un niveau de perfection rarement égalé, offensivement ses compétences sont bien plus maigres. Souvent même, son équipe est prévisible et incapable de se sortir de match piège comme face au Betis la semaine dernière. Face au Real Madrid dans un eterno derbi qui s’annonce essentiel pour la suite de la saison, Arias et Rodri seront très certainement titulaires. Face à Alavés, l’ouverture du score montre bien le style de Rodri, l’importance d’Arias (et le niveau de Lemar quand il est à 100%) dans l’avenir du Cholismo. Leur objectif, comme depuis le début de saison sera simple : répondre aux problèmes de l’Atleti tout en construisant des certitudes pour l’avenir. Un projet pharaonique mais pas irréalisable au vu de leur talent et leurs débuts. L’avenir de l’Atlético est entre leurs mains.
Benjamin Bruchet
@BenjaminB_13