Betis : Jesé est bien tombé

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Cet été, Jesé était pressenti pour signer à Huesca. Finalement, six mois d’inactivité supplémentaires l’ont mené au Betis, où il pourrait bien trouver un contexte favorable sous la direction de Quique Setién qu’il avait connu à Las Palmas. 

Cinq ans plus tard, Jesé est toujours là, bon an mal an. Après avoir mené une petite opération de communication pour mettre en avant son regain de forme (sept kilos perdus, changement dans l’alimentation), le ménage fait dans son entourage, et son auto-critique, le Canarien a effectué son retour sur un terrain contre Strasbourg, fin janvier. Sa saison n’a beau être composée que d’une unique minute de jeu, Jesé se sent prêt. Thomas Tuchel a vanté son professionnalisme, et dans le petit monde du football, ce genre de paroles a du poids. Le Betis a osé parier sur le joueur de 25 ans, là où beaucoup auraient exprimé leur retenue. En Andalousie, il retrouve Quique Setién, qu’il a côtoyé six mois à Las Palmas en 2017. Cette relation est d’ailleurs LA raison de l’atterrissage de Jesé au Betis.

« C’est un garçon qui a sûrement fait beaucoup de choses de manière mauvaise. Son historique récent n’invite pas à compter sur lui, mais la première chose que nous avons prise en compte, c’est qu’il arrive avec beaucoup d’envie. Il veut récupérer le temps perdu » Quique Setién

Le Betis, bien mieux que Stoke ou Huesca

D’une part, l’ailier arrive dans une équipe aux prétentions élevées. La finale de Coupe du Roi est un objectif majeur, d’autant qu’elle aura lieu dans le stade du Betis. À cela, il faut ajouter l’envie de décrocher une nouvelle qualification pour l’Europa League. Le championnat est particulièrement serré cette année, ce qui réduit le droit à l’erreur. Pour un joueur hors service depuis onze mois, débarquer dans une telle équipe doit supposer une excitation immense. Certains le pensaient perdu pour le football, il jouera pourtant le haut de tableau d’un grand championnat. Son passage à Stoke et les rumeurs l’envoyant à Huesca, futur relégué, semblent lointaines.

Le débordement comme arme

D’autre part, le Betis a besoin des qualités de Jesé. L’équipe de Quique Setién fait tout comme il faut, jusqu’à ce que le dernier tiers du terrain le mette face à ses difficultés. Plus grand pourcentage de possession, plus grand nombre de passes effectuées et second au pourcentage des passes réussies. Mais face à des adversaires regroupés, les Verdiblancos sont à la peine. Les joueurs de côté que sont Francis et Junior sont limités à l’heure de créer des décalages. Ils ne sont ni centreurs, ni dribbleurs, ni bons décisionnaires. Résultat, quand le ballon arrive dans leur zone, il en sort rarement bonifié. À eux deux, ils créent peu d’occasions. D’une manière plus générale, le Betis manque de capacité à déborder. Recentré, Joaquín n’est plus l’ailier mangeur de craie d’antan, tandis que Tello, le seul élément susceptible de s’adonner à la provocation balle au pied, fonctionne par intermittences.

Sur un côté, Jesé pourrait alors défier les défenseurs, créer des différences, accélérer le jeu de son équipe dans les derniers mètres. Si ses coéquipiers arrivent à le mettre dans les conditions pour jouer les 1 contre 1, comme City le fait pour Sané par exemple (ce qui est un principe clé du jeu de position ; attirer l’adversaire dans une zone pour toucher un coéquipier dans une zone opposée), le jeu Heliopolitano peut en ressortir grandi. Avant goût d’un tel destin, le natif de Las Palmas réussit généralement entre deux et trois dribbles par match sur l’ensemble de sa carrière. Dans l’effectif du Betis, seul Lo Celso présente un taux de réussite similaire, en exerçant toutefois son talent bien plus loin des cages adverses.

L’introduction de Jesé au poste d’ailier requerrait une adaptation tactique de Setién, qui devrait vraisemblablement abandonner son 3-4-2-1, dépourvu d’ailiers. Le 3-4-3 est une option. À cette capacité à jouer les 1 contre 1, il faut ajouter une certaine habileté à les ponctuer d’un but. D’ailleurs, l’Espagnol est un bon frappeur, manquant très peu le cadre. Cette tâche, c’est celle que Takashi Inui n’a pas réussi à accomplir pour les Béticos, malgré le succès auguré.

Bien courir, ça change tout

Autre caractéristique propre à Jesé, susceptible d’aider les pensionnaires de Liga : l’apport de ses courses. Contrairement à Toni Sanabria ou Sergio León, l’ex Merengue est un attaquant mobile, s’il est installé en pointe. Il ressemble davantage à Loren Morón qu’aux joueurs susnommés, lequel bénéficie de la confiance absolue de l’entraîneur. Ces courses justement, permettent de conférer une profondeur nécessaire au jeu bético. Celui-ci s’aère, libérant des espaces pour tout le monde, en plus de permettre le développement de nouveaux circuits de passe. La plus-value ne serait cependant pas garantie. Le joueur n’est pas forcément des plus à l’aise à ce poste. Pour l’instant, on est dans l’ordre du théorique. Setién le résume bien : « Jesé n’est pas clairement un attaquant de pointe clair, mais il peut jouer là« .

Enfin, Jesé est un atout non-négligeable en transition offensive. Malgré sa volonté de développer un jeu en ne sautant aucune étape dans l’avancement sur le terrain, le Betis reste une équipe à l’aise en transition offensive. L’exemple le plus marquant est la victoire 4-3 au Camp Nou. Avec sa puissance, le nouveau transfuge du Villamarín sera utile à l’heure d’attaquer de grands espaces. Aussi, il constituera une menace permanente pour la défense adverse, obligée de surveiller ses courses même lorsque le Betis sera dans la phase de construction. Une passe casseuse de lignes signée Canales ou Lo Celso est vite arrivée.

Jesé dispose de six mois pour se relancer. De manière compréhensible, son arrivée suscite beaucoup de scepticisme chez les supporters. La cohérence tactique n’est pas suffisante pour convaincre. Le terrain, lui, le sera peut-être. Il y a cinq ans de cela, le jeune numéro 20 du Real n’avait eu besoin que de quatorze jours (et trois buts) pour changer le cours de sa carrière.

Elias Baillif (Elias_B09)

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