Ultra, ferveur, indépendance et Catalogne : Mieux que le Barça, Sant Andreu

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Dans la famille du football à Barcelone on connaît beaucoup le Barça et un peu l’Espanyol. En Catalogne, Girona commence à être placé sur la carte. Pourtant un club de D4 fait de plus en plus parler de lui. Entre ultras violents et ouvertement pro indépendance, histoire vieille de 100 ans et senyara catalane, voilà le EU Sant Andreu, l’autre visage de Barcelone.

Il y a de ça quelques saisons, le Barça, club emblématique espagnol mais aussi étendard de la Catalogne avait fait le choix de porter un maillot reprenant le thème de la Senyera catalane. Pourtant le Barça n’a pas pris parti lors du dernier référendum et a même joué le match face à Las Palmas à huit clos alors que de violents heurts avaient lieu en ville. À Barcelone pourtant, un club vieux de 100 ans porte depuis bien longtemps ce maillot reprenant la Senyera catalane et ses supporters militent avec ferveur et violence pour l’indépendance. Présentation du EU Sant Andreu, le plus emblématique des clubs non professionnels de Barcelone mais qui ne se considère pas de Barcelone. La locura totale.

Plus de 100 ans d’histoire pour un club fondé par des… Écossais.

Pour comprendre ce qu’est et représente l’UE Sant Andreu il faut se plonger dans l’histoire de son quartier qui était une ville indépendante au départ. Souvent le parallèle est fait entre le Rayo et Sant Andreu. Il ne tient pas sur tous les points et cache souvent une paresse intellectuelle mais sur le point de l’enracinement et de l’histoire de son environnement il y’a de réelles similitudes. Comme Vallecas, le district de Sant Andreu était une ville au 19e siècle. Une vieille ville même avec plus de 500 ans d’histoire. D’origine paysanne, la ville de Sant Andreu de Palomar va totalement changer à la fin du 19e siècle. Sur décret royal et comme des centaines d’autres bourgades, Sant Andreu est rattachée à la grande ville la plus proche, en 1897. Pour eux, ce sera Barcelone. Rapidement, le nouveau district devient le poumon industriel de la ville et compte plus de 100 usines à peine 20 ans après son rattachement.

Sant Andreu change totalement mais garde son esprit village. Quand on va dans ce district, on est plus vraiment à Barcelone. Sa population change pourtant radicalement. Son industrialisation va de pair avec un flot de nouveaux habitants dont des écossais embauchés dans l’usine de chapeau et de manteau du quartier qui deviendra le premier grand investissement britannique à Barcelone. Aujourd’hui, cette immense usine est devenue un grand centre culturel et sportif public mais au début du 20e siècle, il va permettre de développer le football dans cette ville devenue un quartier.

Crédits : Twitter

Dans l’année 1900, les ouvriers écossais forment le Escocés Fútbol Club et jouent quelques amicaux face aux autres formations qui commencent à se structurer dans la péninsule. L’histoire ne dure même pas un an et les écossais acceptent rapidement de rejoindre une ou plusieurs formations en même temps en échange d’argent et le club disparaît. L’un d’eux va même devenir le premier buteur de Barça en compétition officielle. Pendant 9 ans, plus aucune trace d’un club à Sant Andreu jusqu’à la formation du Zeta FC qui deviendra en 1925 le UE Sant Andreu.

Senyera catalane depuis le début

Pour beaucoup, le Barça est le club qui représente la Catalogne quand son voisin l’Espanyol représente l’unionisme et l’Espagne. Déjà que l’histoire est plus compliquée que ça, le Barça devient un club mondial et semble maintenant se servir de la Catalogne simplement dans un but commercial pour garder son image de club différent intacte. Le match face à Las Palmas disputé dans un Camp Nou vide alors que de violents heurts entre pro référendum et policiers avaient lieu ont choqué beaucoup de monde même chez les plus fervents socios.

Crédits :Deporte Valenciano

Au milieu de tout ça, Sant Andreu milite avec un maillot jaune barré de quatre bandes rouges directement inspirées de la Senyera catalane qui est le drapeau des organismes officiels catalans. Portée avec fierté et symbole de l’EU Sant Andreu, il a donc été très mal vu de voir un club comme le Barça vouloir apposer ce drapeau symbolique sur un maillot d’entraînement ou sur un troisième maillot rarement utilisé mais vendu par centaines de milliers.

Desperdicis 07 : ultra, pro indépendance et groupe violent.

Derrière ce vernis, sportivement le club n’a jamais été plus haut que la Segunda et jamais très longtemps. Militant plus régulièrement en Tercera voir en Segunda B, l’EU Sant Andreu est un vrai club non professionnel. Enfin plus vraiment. Sous l’égide de Joan Gaspart ancien président du Barça le club est devenu une société anonyme et a donc une structure professionnelle depuis le milieu des années 2000. Ce changement n’a pas aidé le club et a même miné ses finances.

Actuellement en Tercera, le club joue quand même régulièrement devant un millier de spectateurs dans un petit stade de plus de 6 000 places. Surtout que ces spectateurs sont actifs et organisés en groupe ultra qui mettent l’ambiance avec des drapeaux et des chants. C’est ce qui fait la renommée de Sant Andreu actuellement avec en « vedette » les Desperdicis 07. Ce groupe est très actif et est le premier ouvertement politisé à s’implanter dans les tribunes du stade Narcis Sala. Depuis les années 80, le club de Sant Andreu dispose déjà de tribunes vivantes et de groupe de supporters actifs, mais depuis 2007 le stade a basculé dans un tout autre univers. La devise des Desperdicis  est « honneur, humilité, sacrifice et passion, les quatre barres que nous défendons chaque jour de notre vie. »

« Sales espagnoles, partez d’ici »

En 2016, le groupe fait pour la première fois la une des médias nationaux après l’agression à la sortie d’un métro de Sant Andreu d’un groupe de jeunes filles faisant la publicité d’une diffusion publique d’un match de la Roja à coups d’insultes et de crachats. Les Desperdicis sont très vite accusés et ce à raison. Ce groupe ouvertement communiste et pro indépendance n’hésite pas à recourir à la violence lors de ses actions. Participant activement à la détérioration du climat à Barcelone où les tags violents pro-indépendance et les agressions sont régulières.

« La différence la plus significative entre Andreuencs et Desperdicis est la politique, Andreuencs l’a rejetée et nous nous sommes définis comme anti-fasciste » explique un membre des Desperdicis à labandaizquierda

Les Desperdicis ont par exemple rejoint dès leur création le Mouvement antifasciste de combat (MAC) qui a été fondé après la mort d’un militant d’extrême-gauche. Ce groupe fait régulièrement des expéditions punitives et multiplient les arrestations pour agressions. Ils sont aussi accusés de multiples actions dans des universités à base de tags et de menaces physiques. Le groupe ultra est même accusé d’avoir causé la mort d’un Ukrainien lors d’une manifestation. Dans une ville où l’extrême prospère, ce mouvement dénote. La preuve, le groupe ne dispose d’aucun lien direct avec les autres groupes ultras de Barça mais à des liens avec ceux d’Alcorcon ou Lleida.

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En tribune, les animations sont nombreuses. Les chants et tifos sont de très bonnes facture mais les débordements réguliers aussi. En 2010, face au Barça B, les Desperdicis sont accusés d’avoir voulu attaquer les joueurs Culés. Les échauffourées se sont ensuite déplacés dans les rues adjacentes du stade. Oriol FCB l’un des leaders du groupe a été maintes fois arrêtés. Il n’y a pas si longtemps le même genre de dérives est arrivé face à Castellon.

« Nous ne somme pas de Barcelona »

Lors du procès de l’un de ses membres, un procureur espagnol a résumé la genèse du groupe ultra:  » Fondé par des personnes appartenant au mouvement communiste, caractérisé par ses idées d’indépendance révolutionnaire et d’anarchisme violent dans le quartier de Sant Andreu à Barcelone et qui s’intègre comme un ultra collectif au niveau de l’animation du club de football de l’UE Sant Andreu, ayant pour objectifs politiques la lutte, parfois par le recours à la violence, contre tout ce qu’ils identifient comme fascisme et contre le capitalisme qui, selon son idéologie, le génère « .

Début 2018, Piqué fait polémique en appelant l’Espanyol de Barcelone, l’Espanyol de Cornella lieu où est basé son stade. Après une plainte des Pericos, les Desperidicis ont profité d’un match entre la B de l’Espanyol et Sant Andreu pour afficher une banderole : « Calme-toi, nous ne sommes pas non plus de Barcelone » se payant alors le symbole de l’indépendance pour certaines personnes en France. Le San Narcis, maison de Sant Andreu vit au rythme de ses tribunes et permet de sentir le pouls si particulier de ce quartier où une frange milite pour la séparation avec Barcelone.

Attaquant le soir, vendeur dans un magasin de lingerie la journée, le quotidien d’un attaquant de Sant Andreu

Côté tribune Sant Andreu vit une de ses meilleures périodes mais côté finances et sportif c’est très compliqué. Le club végète en 14e place de la Tercera et tous ses joueurs ont besoin de travailler à côté pour vivre. Le capitaine et pas mal d’autres joueurs sont courtiers en assurance et l’attaquant El Hadji travaille dans un magasin de lingerie. Les salaires varient entre 200 et 1000 euros à Sant Andreu, travailler en dehors des terrains est donc nécessaire pour ses footballeurs.

Crédits : Marca

Le président de Sant Andreu l’explique régulièrement, sa formation est constamment en déficit et il doit jongler avec différentes compétitions pour équilibrer les comptes et maintenir ce club important pour son quartier en vie. Manuel Camino président de Sant Andreu depuis 2011 l’explique : « Sant Andreu est une institution dans le quartier. » Patxi Salinas frère de Julio et entraîneur du club en 2013 rajoute « Quand vous marchez dans la rue, les gens vous demandent comment s’est passée l’équipe. C’est un club très familial, dans un quartier modeste, où tout le monde est très proche. »

Pour beaucoup, lors du seizième de finale retour, Sant Andreu joue sa finale de champion’s au Wanda Metropolitano face à l’Atleti. Cependant, ce n’est que le cerise sur le gâteau pour un club qui a vécu des périodes très difficiles et se remet enfin dans le bon sens et regarde l’avenir avec confiance. La qualification pourrait valider le renouveau de ce club très ancien qui après avoir fait le tour du milieu amateur se rêve d’un destin professionnel. Cette ville dans la ville semble le mériter.

Benjamin Bruchet 

@BenjaminB_13

 

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