L’Espagne est un pays de football, personne ne pourra nier cette affirmation. Derrière les résultats éblouissants sur la scène européenne ou encore des chocs connus comme le Clasico, le Gran Derbi ou le Derbi de madrid, d’autre rivalités existent en Espagne. Présentation d’une d’entre elle, sûrement la plus particulière entre l’Athletic Bilbao et l’Atletico de Madrid.
Telmo Zarra, Larbi Ben Barek, Aritz Aduriz, Joseba Etxebrria, Luis Aragones ou encore Abelardo, de nombreux grands joueurs ont porté le maillot de l’Atletico ou celui de l’Athletic. Les deux formations qui ont plus de 100 ans d’existence ont modelé le football espagnol et sont intimement liées depuis toujours. Pourtant, depuis quelques années, à chaque déplacement de l’Atletico à San Mames les sifflets et les insultes pleuvent envers les matelassiers. La réception des basques à Madrid est souvent du même acabit. Mais comment deux clubs aussi proches ont pu se détester de la sorte ? Présentation d’une rivalité méconnue mais importante en Espagne.
L’Atletico Madrid, une succursale de l’Athletic dans la capitale
Fondé en 1898, l’Athletic Bilbao a été durant longtemps le plus grand club de football de la péninsule. Le club a régné en maître sur le pays basque et remporté plus d’une fois son championnat régional. Par la suite, une coupe nationale est créée sous l’impulsion d’un catalan basé à Madrid et soutenu par Alfonso XIII, cela deviendra la Copa Del Rey. Cette coupe qui se dispute encore aujourd’hui est ce qui se rapproche le plus d’un championnat national à l’époque et a pour fonction de définir le meilleur club du pays. L’Athletic remporte notamment celle de 1903 et 1904.
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Lors du titre de 1903, les basques sont nombreux à Madrid pour fêter la victoire de l’Athletico. Etudiants pour la plupart, ils ont la nostalgie du pays et du grand club qu’est l’Athletic. Ils décident alors de créer une filiale de leur club bien aimé à Madrid et ils le nomment de la même façon que leur formation de coeur : Athletic Club. Le football à Madrid n’est pas aussi développé qu’au Pays Basque mais le club rattrape vite son retard.

Rapidement l’Athletic de la capitale récupère un terrain et draine les basques partis à Madrid pour les études ou le travail. La proximité avec le grand frère espagnol est trop proche et les deux entités ne sont autorisé à jouer ensemble qu’en compétition officielle. Alors le club de Bilbao pioche des joueurs du club de Madrid par exemple pour l’édition 1911 de la Copa Manuel Garnica Serrano est coopté par les basques et soulèvera même le trophée. La proximité entre les deux entités est à son paroxysme.
Les couleurs puis une volonté d’émancipation des madrilènes
En 1909, une première décision éloigne légèrement les deux clubs et annonce les prémices d’une séparation. Avant cette année 1909, les deux formations jouent avec des maillots rayés bleus et blancs récupérés en Angleterre au club de Blackburn. L’émissaire envoyé par les deux entités en Angleterre pour renouveler les lots de maillots ne retrouve pas ceux des Rovers et se rabat sur les maillots rouges et blancs de Southampton sa ville d’embarquement pour l’Espagne. Il y a une autre rumeur pour expliquer le changement de couleur mais elle bien moins romanesque.
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Ces nouvelles couleurs sont bien acceptées par les deux clubs, cependant celui de Bilbao opte pour un nouveau short noir quand Madrid préfère garder le short bleu originel. Les maillots rojiblancos vont donner une aura nouvelle au club de Madrid. Ces couleurs sont les même que les dessous de matelas fabriqués proche du stade des madrilènes. A la vue de ces maillots, la foule surnommera logiquement le futur Atletico: Les colchoneros (les matelassiers). Le surnom restera, comme les couleurs tout de suite adoptées.

Rapidement, l’Athletic de Madrid gagne en popularité et en grandeur. En 1921 le club hérite d’un stade flambant neuf, le feu Metropolitano et devient totalement indépendant. Lors de la même année l’Atleti affronte son grand frère basque en finale de la Copa Del Rey mais s’incline. C’est le premier âge d’or du club madrilène qui va remporter plusieurs championnats de Madrid. La rivalité va montrer crescendo.
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Membre fondateur de la Liga, puis la fracture avec l’Atletico Avacion
L’Athletic de Madrid maintenant totalement indépendant, le club fait parti des fondateurs de la Liga en 1928. Rapidement, on se rend compte de l’instabilité chronique dans les gènes du club qui deviendra par la suite l’Atletico. Jusqu’à l’éclatement de la guerre civile, l’Athletic de Madrid enchaîne les descentes et les montées et se retrouve ruiné.
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La prise de pouvoir de Franco va littéralement sauver l’Athletic de Madrid mais aussi couper définitivement ce qui le lie encore un peu à son père basque. Sous l’impulsion du dictateur, on supprime les noms étranger des clubs et l’Athletic de Bilbao devient l’Atletico de Bilbao. Traitement identiquement pour l’entité de Madrid mais lui devient Atletico Aviacion de Madrid à la suite d’une fusion. Le club est sauvé mais deviendra très proche du pouvoir. Les basques sont associés au pouvoir mais pour une raison différente. Le jeu rugueux et la politique 100% Euskadi plaît énormément aux dignitaires Franquistes, ce qui n’est pas réciproque. Les Colchoneros ont vendu une partie de leur âme, ont changé de couleurs mais vont devenir une des places fortes du football espagnol grâce à cette fusion. En 1947 le club devient officiellement l’Atletico de Madrid et vogue vers un titre de champion avec la doublette française géniale : Ben Barek – Helenio Herrera.
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Depuis, les chocs entres les deux formations ont toujours une saveur particulière pour les supporters. Bien que certains responsables aient des excès de zèle (il y’a quelques années, un dirigeant de l’Athletic avait accusé l’Atletico d’avoir volé les couleurs et l’écusson du club basque à ses débuts) les relations sont cordiales entre les deux clubs mais les matchs toujours accrochés. Par exemple en 1930, quand l’Athletic a battu sèchement son homologue madrilène à Madrid, une défaite qui a relégué les colchoneros. En 1985, alors que les Basques sortent d’un doublé coupe-championnat ils se qualifient de nouveau pour la finale où ils affrontent l’Atletico. Hugo Sanchez claque un doublé et offre la coupe aux matelassiers avant de s’envoler pour le Real. On peut aussi citer la finale d’Europa League de 2012. Le dernier exploit des basques pendant que le petit frère madrilène est devenu un top club européen. Lors de cette finale les hommes de Bielsa sont battu sèchement par ceux du Cholo. Depuis l’Athletic dépéri quand l’Atletico est un rouleau compresseur.
Benjamin Bruchet
@BenjaminB_13