FC Barcelona, Atlético de Madrid, Valencia CF, Athletic et bien d’autres clubs disposent d’une section féminine de haut niveau en Espagne. Tous sauf un et non des moindres : le Real Madrid. Florentino Pérez dispose de tous les éléments pour créer une équipe de haut niveau mais rechigne toujours à franchir le pas.
C’est un serpent de mer du football espagnol. Alors que l’essentiel des grands clubs du pays ont investi dans une section féminine, le Real Madrid reste le grand absent de la Liga Iberdrola. Manifestement, le club le plus titré d’Europe fait l’économie d’une équipe féminine. Pourtant, l’Espagne progresse d’année en année, tant en sélection qu’en club et l’Atlético de Madrid comme le Barça participent à la Ligue des Champions. D’ordinaire toujours prompt à mettre le Real Madrid sur la carte, et même s’il a les moyens de financer un tel projet, Florentino Pérez reste sourd aux demandes, y compris celles des joueuses évoluant dans des équipes rivales.
« Le Real Madrid est un club immense et notre championnat y gagnerait énormément s’il fondait une section féminine. Pour autant, ça fait des années que la question se pose de manière récurrente et il est évident que Florentino Pérez ne veut pas miser sur le football féminin » Jenni Hermoso, atlético de madrid, ¡furialiga!, octobre 2018
Le Madrid CFF pour combler un manque
A l’heure actuelle, c’est le Madrid CFF qui fait office de petit frère de la Casa Blanca. L’histoire du club n’est pas banale et la rivalité avec l’Atlético est au centre de sa création en 2010. Paula Ulloa joue au poste de gardienne de but. Talentueuse, elle est suivie de près par la cantera colchonera. Or, son père Alfredo est un Madridista hasta la muerte. Non, sa fille ne portera pas les couleurs des Indias, c’est hors de question. Comme on n’est jamais mieux que par soi-même, l’opticien crée son propre club. Sept ans plus tard, le Madrid CFF monte en Liga Iberdrola.
En mai 2017, il expliquait son cheminement dans Diario AS : « Quand ma fille a commencé à jouer, la première chose à laquelle j’ai pensé c’est « elle doit jouer au Real Madrid ». Ensuite, elle a demandé « comment cela se fait-il qu’il n’y ait pas d’équipe féminine ? ». L’unique option pour jouer à Madrid dans un équipe de haut niveau, c’était l’Atlético. J’ai fondé le club parce que ma fille ne pouvait pas jouer au Real Madrid. Le Madrid CFF a surgi avec un projet digne pour occuper la place délaissée par le Real Madrid ».
c’est essentiel que les grands clubs, et surtout ceux qui ont le plus de poids économique et médiatique, aient une section féminine. C’est fondamental. Une équipe qui brille par son absence, c’est le Real Madrid. A mon avis, le jour où le Real Madrid aura une équipe, le football féminin avancera à vitesse grand V, parce que ce ne sera une équipe moyenne, ce sera une belle équipe avec de grandes joueuses. Ça accélérerait immédiatement notre reconnaissance et notre médiatisation. marta peiró, valencia cf, ¡furia liga!, février 2018
Fin de non-recevoir
Pour FloPer, l’essentiel du travail est quasiment fait pourtant. Il pourrait très bien convaincre Alfredo Ulluoa de lui céder sa licence en Liga Iberdrola. Plutôt une bonne affaire pour le Real Madrid puisque le Madrid CFF, qui n’avait pas comme ambition première d’accéder à l’élite du football féminin espagnol, a aussi développé une cantera performante qui rassemble plus de 200 joueuses. Or, ce n’est pas aussi limpide. « Cela dépend des dirigeants et de leur stratégie estimait Alfredo Ulloa au moment où son club était à un pas de monter en Primera. Comme socio du Real Madrid, cela me paraît très mal de ne pas avoir de section féminine ».
De plus, ce qui aurait été faisable il y a quelques années l’est beaucoup désormais, pour de logiques raisons sentimentales : « Florentino Pérez ne s’y jamais intéressé. Au début, j’ai fait dans cette idée et l’idée de jouer en blanc était un clin d’oeil. Mais maintenant, après tous les efforts que nous avons fait, cela me coûte de dire « prends-le et apporte-le » ». Et si le début de saison du Madrid CFF est un peu rude, la saison 2017-2018, sa première à ce niveau, a été probante avec une 9e place finale. Surtout, le derbi madrileño contre l’Atlético disputé au Wanda Metropolitano a rassemblé 22.200 personnes, un record pour un match de Liga Iberdrola.
Lors de la dernière assemblée générale des socios en septembre, Florentino Pérez a répondu à toutes les questions… sauf celle concernant le football féminin. Un silence particulièrement explicite. La situation ne devrait donc pas évoluer sous son mandat. Un retard terrible qui ne devrait donc pas être compensé par la présence du Madrid CFF. Un clair manque de clairvoyance de FloPer. Et quand le Barça ou l’Atlético de Madrid seront en lice pour remporter la Ligue des Champions, il sera beaucoup trop tard pour avoir des regrets.
François Miguel Boudet
@fmboudet