Ce vendredi soir, à 20h45, la Sélection basque de football, communément appelée l’Euskal Selekzioa, affronte le Venezuela, à Mendizorroza, le stade du Deportivo Alavés. Dirigée par Mikel Etxarri et José María Amorrortu, cette équipe d’une région découpée entre la France et l’Espagne affronte celle d’un pays reconnu par la FIFA. L’existence d’une telle entité va bien au-delà d’un simple match amical.
Au même titre que ses homologues corse et catalan, qu’elle a déjà affronté, la Sélection basque n’a pas d’existence officielle. Pourtant, l’Euskal Selekzioa est connue dans tout le Pays basque et est un motif de fierté. Mais comment une telle entité peut être autorisée à disputer des matches régulièrement ? C’est très simple.
La Fédération basque de football milite depuis 1929 pour l’officialisation de sa propre sélection. Une chose qui a toujours été refusée, par la Fédération Espagnole mais aussi – et surtout – par la FIFA. Pour se faire connaître, elle parvient tout de même à disputer des matchs amicaux contre des sélections « officielles ». Son dernier match remonte à 2016. L’Euskal Selekzioa avait alors reçu la Tunisie, qu’elle avait battu (3-1) à San Mamés.

L’Euskadi XI (surnom moins courant donné à l’équipe basque, ndlr) dispute donc des matchs amicaux, contre les équipes qui acceptent de l’affronter. Celles-ci sont généralement issues des pays d’Amérique Latine – comme ce vendredi –, d’Afrique ou encore d’autres sélections régionales. Certains pays refusent de jouer contre les Basques. Ils estiment généralement que l’équipe n’est pas au niveau (ce qui est largement discutable) ou, plus vraisemblablement, ont peur de légitimer la demande de la reconnaissance officielle de la Selekzioa.
Pour Rafael Dudamel, le sélectionneur du Venezuela, les choses sont différentes : « nous allons affronter le Pays Basque comme s’il s’agissait d’une équipe de la FIFA », avant de souligner l’honneur que les joueurs basques doivent avoir en représentant leur région.
Il est aussi intéressant de noter que la Fédération basque a proposé au Chili en avril dernier d’organiser un match amical, ce que le double tenant du titre de la Copa América a finalement refusé, expliquant préférer affronter une équipe qualifiée pour le Mondial 2018… alors qu’il n’était pas qualifié !

Les enjeux forts de ce match
Chaque match disputé par l’Euskal Selekzioa revêt un caractère important. L’occasion est toujours de faire la promotion de cette sélection régionale et aussi de montrer son importance pour le peuple basque.
Généralement, elle dispute environ un match par an, souvent en décembre pendant la trêve hivernale. Mais l’échec de la dernière opposition face à la Tunisie a changé les choses. Ce n’est pas la prestation des joueurs convoqués qui a porté préjudice, mais celle des supporters. Comme dans toutes les régions d’Espagne, la période de Noël est très importante, ce qui a conduit seulement 15 000 personnes à se déplacer à Bilbao ce 30 décembre 2016.
Cet échec a conduit les dirigeants de la Fédération basque à réformer les choses. Plusieurs problèmes ont été soulevés par les adeptes de l’Euskal Selekzioa. Le premier concerne l’adversaire. Ils veulent voir de plus grandes sélections affronter la leur. Actuellement, cela reste compliqué et visiblement, cela n’a pas pu être réalisé, puisque le Venezuela n’était pas qualifié pour la Coupe du Monde. Le second, plus important, concerne les dates. Le traditionnel match de Noël (surnom donné par les Basques à ces matchs, ndlr) doit disparaître. C’est donc l’occasion pour Luis María Elustondo, le président de la Fédération basque, d’instaurer un match en pleine trêve internationale d’octobre. C’est-à-dire lorsque les sélections reconnues par la FIFA jouent. Une bonne manière de favoriser la venue des supporters, mais aussi et surtout de se faire voir. Là-encore, l’enjeu de la demande d’officialisation tient une place la plus prépondérante. Elle devrait se retrouver dans le match contre la Vinotinto.

Iñigo Martinez, tiraillé entre Espagne et le Pays Basque ?
Chaque match de l’Euskal Selekzioa s’accompagne de sa polémique. En plus de celles se moquant de l’existence – voire de la légalité – d’une telle équipe, c’est le défenseur de l’Athletic Íñigo Martínez qui est désormais visé.
Selon le défenseur central, il s’agirait d’une erreur entre les différents services médicaux. Mais pour d’autres, il s’agirait d’une preuve qu’Iñigo Martinez préfère l’Euskal Selekzioa à la Roja. Dans les faits, l’Athletic Club aurait fait savoir à la Fédération espagnole que son joueur s’est blessé lors du match contre le Barça (1-1 au Camp Nou, ndlr). Luis Enrique, le sélectionneur national, a alors décidé de convoquer à la place Marc Bartra. Problème : juste après, le défenseur a participé à la totalité du derbi contre la Real Sociedad (1-3 pour son ancien club, ndlr). L’ancien coach du Barça a expliqué que « l’Athletic a pris un risque car il s’agit du derbi, un match très important pour le club comme le joueur ». Mais tout s’emballe lorsque le joueur est convoqué par Mikel Etxarri et José María Amorrortu, les sélectionneurs basques, pour affronter le Venezuela.

Dès lors, certains parlent d’une provocation du joueur qui a préféré jouer avec l’équipe de sa région. Dans la réalité, le Bilbayen s’est toujours donné à fond pour les deux sélections, honorant au mieux chacune de ses convocations. Jusqu’à aujourd’hui (s’il participe au match contre le Venezuela), il a disputé cinq matchs avec chacune des deux sélections.
Pour essayer de calmer les polémiques, il a publié un message sur Twitter, expliquant que personne ne devrait douter de son engagement avec la Roja :
Que nadie tenga duda de que, desde siempre, mi compromiso es total con la @Sefutbol y que trabajaré a tope para poder estar en próximas convocatorias. Todo ha sido un malentendido entre los servicios médicos. Nada más. Seguimos! 💪⚽ pic.twitter.com/FeHBFyvjJj
— Iñigo Martinez (@InigoMartinez) October 11, 2018
Deux habitués de l’Euskal Selekzioa désormais retraités
Impossible de traiter de cette sélection basque sans parler de Xabi Prieto et Imanol Agirretxe, deux stars de la Real Sociedad mais aussi du football basque. Retraités depuis peu, ils ne participeront pas au match de ce vendredi soir.
En revanche, ils recevront un hommage mérité. Xabi Prieto, joueur le plus sélectionné – 14 fois – rendra officiellement donc son brassard de capitaine. Sans trop de surprise, Aritz Aduriz, meilleur buteur de l’Euskal Selekzioa, devrait en être le digne héritier. Il ne va sans dire que l’absence des deux anciens Txuri-urdinak sera remarquée.

À quoi s’attendre pour ce match ?
Après presque deux ans d’absence, c’est donc le grand retour de l’Euskal Selekzioa. Pour le préparer au mieux, la Fédération a opté pour un stade plus petit, le Mendizorroza et ses 20 000 places. Situé dans la capitale de la Communauté autonome du Pays Basque, Vitoria-Gasteiz, ce stade va permettre d’accroître les chances de remplissage de ce dernier, d’autant que le taux de remplissage de l’enceinte du Deportivo Alavés est le meilleur de la Liga et frise les 100% sur l’ensemble de la saison.
Dix-huit joueurs ont été convoqués pour ce match. On y retrouve cinq joueurs de la Real Sociedad, cinq de l’Athletic, trois de Leganés, trois d’Alavés et deux du SD Eibar. On y retrouve des habitués, tels qu’Aritz Aduriz ou Asier Riesgo, mais aussi des nouveautés, comme Aritz Elustondo ou encore Anaitz Arbilla.

Les Basques internationaux comme Ander Herrera (Manchester United) et Javi Martínez (Bayern Munich) ont été conviés par les sélectionneurs mais ont expliqué ne pas être intéressés par l’Euskal Selekzioa. Ces absences risquent de décevoir des supporters basques attachés à leurs origines. Du côté des internationaux espagnols, les appeler n’était évidemment pas envisageable.
Comme lors de chaque rencontre, nous pouvons imaginer un premier onze qui participera à la première période avant d’être en partie changé au début de la seconde. Avec le peu de matchs disputés par cette équipe, l’inexistence d’indices et la nouveauté dans les convoqués, il est très difficile d’imaginer une composition.
Asier Riesgo, avec davantage d’expérience que Jon Ander Serantes, devrait débuter. On pourrait également retrouver Martín Aguirregabiria et Yuri Berchiche en défense, Asier Illarramendi et David Zurutuza au milieu ainsi qu’Aritz Aduriz et Ibai Gomez en attaque.
Le XI probable de l’Euskal Selekzioa
La liste des premiers remplaçants pourrait donc être la suivante : Serantes, Iñigo Martinez, Manu García, Mikel Vesga, Javier Eraso, Bautista et Sangalli.
En France, le match est uniquement diffusé sur la télévision basque. Pour ceux qui la reçoivent, le rendez-vous est donné sur ETB 1, dès 20h25, avec l’ouverture et les débats.
Jérémy Lequatre-Garat
@Euskarade