Le recrutement, comment ça marche ?

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Le mercato a fermé ses portes il y a quelques semaines et comme souvent il a suscité beaucoup d’intérêt. L’un des sujets qui revient régulièrement sur le devant de la scène et la relation entre les clubs et les agents. Avec des idées d’Albert Valentín (OM), ¡FuriaLiga! tente de vous en dire plus :

Albert Valentín est arrivé à l’OM de la main d’Andoni Zubizarreta aujourd’hui directeur sportif du club phocéen et souvent critiqué lors de ces périodes mercato si intenses. Avant d’avoir posé leurs valises dans la cité phocéenne, les deux se sont forgés une expérience internationale au FC Barcelone. Un mois après sa présentation officielle à l’OM, Albert Valentín, le directeur sportif adjoint, a sorti son premier livre, une publication sur la direction sportive dans un club de football professionnel. En plus de parler de sujets très intéressants sur ce qu’ils ont pu et veulent implanter dans leurs clubs et que nous verrons surement plus tard sur ce site, Valentín revient sur la relation entre le directeur sportif et les agents pour les transactions. Son livre étant sorti peu après son arrivée, on peut déduire que les exemples et expériences citées proviennent ses anciens postes à Figueres, Saragosse et Barcelone (Espanyol et Barça).

Une relation importante mais pas décisive

Tout d’abord même si cette relation peut être sulfureuse elle reste indispensable et souvent fructueuse pour une simple et bonne raison : un intérêt commun. L’agent vend un « produit » selon la demande d’un « responsable d’achats ». Comme dans toutes les autres branches, le style de la finalisation d’un transfert (d’une vente ou d’un achat) dépend des personnes impliquées. On peut finir avec une affaire totalement propre ou le contraire. Valentín met lui l’accent sur la force mentale du directeur sportif qui doit alors résister à une énorme pression contre un agent qui utilise tous les moyens possibles pour arriver à sa fin (notamment les médias). La réalité est qu’il n’existe aujourd’hui aucune règle écrite pour cette relation car elle dépend d’une floppée de facteurs internes et externes. Il ne faut pas oublier que l’objectif principal de l’agent est de gagner de l’argent ce qui est logique mais cela peut aussi se faire en suivant des critères éthiques, légaux et fidèles (la majorité des agents le font selon Valentín). C’est ce qu’il prône dans son livre en tout cas.

Crédit : ABC

Dans une relation correcte et fidèle, les deux parties doivent partir du principe que celle-ci est professionnelle. Un exemple fort : pour lui, jamais un lien personnel négatif avec un agent ne doit fermer les portes d’un joueur intéressant sportivement ou vice-versa. Une bonne relation facilite bien sûr les choses mais elle ne doit pas cacher le réel intérêt, apporter un plus sportif. Vous avez surement plusieurs exemples contraires qui vous viennent en tête pas vrai ? Autre cas énoncé : les dirigeants ne doivent pas écarter un joueur intéressant à cause de mauvaises expériences passées avec son agent. Déjà lors de notre discussion avec lui à Madrid, pour Valentín la seule chose qui compte est le professionnalisme et il tente de l’inculquer dans tous les départements avec lesquels il travaille. Pas de rendez-vous hors du cadre professionnel, ne jamais accepter de cadeaux ni faveurs… Pour résumer, il faut couper les ponts du personnel entre les deux pour éviter de tomber dans une spirale de malentendus ce qui est difficile après plusieurs années dans le monde du football.

La communication

Conférencier reconnu et professeur à l’école des entraineurs de la RFEF (Real Federación Española de Football), Valentín est assez calé niveau communication. Par le passé, il a repéré et noté plusieurs façons de faire avec les agents, surtout selon le statut d’un club. Pour lui, les « grosses écuries » sont plus enclines à aller vers l’agent plutôt que le contraire. Le top club a un secteur bien plus sélect pour choisir donc logiquement plus réduit, mais peut s’en sortir plus facilement grâce à une économie forte. Pas besoin de recevoir tous les agents qui débarquent avec leurs nombreuses propositions. Pour les clubs « moyens » c’est un peu plus complexe. Il est très important de bien sélectionner le profil des joueurs recherchés pour donner des consignes très détaillées à l’agent et ainsi éviter une ribambelle de propositions qui ne collent pas aux recherches. Le secrétariat technique doit détecter un profil bien défini mais ne contrôle pas tous les mouvements et situations du marché, et c’est là que l’agent entre en jeu. On parle bien ici d’agent et non de représentant qui gère les intérêts généraux d’un joueur alors que le premier intervient comme « intermédiaire » dans une opération de recrutement (selon la dernière règlementation).

Crédit : Diario de Navarra

Avant de débuter le processus de négociation, il faut établir le contact. Il y a trois types de contact DS – Agents selon Valentín. Le premier est un « contact routinier », l’agent téléphone au club pour connaitre ses besoins ou parler de situations de joueurs. Ici, il ne faut surtout pas montrer un intérêt clair ni écarter totalement une idée proposée mais seulement arranger une réunion. Ensuite, nous avons le « contact informel », cette fois c’est le club qui approche l’agent pour connaitre la situation concrète d’un joueur. Encore une fois il est primordial de rester concentré sur la situation contractuelle du joueur et les circonstances professionnelles qui l’entourent sans aller plus loin. On laissera ce dernier aspect pour le troisième et dernier type, le « contact formel » pour confirmer un intérêt pour son poulain. Pour ces trois différentes approches il est impératif de savoir différencier une prise de position (intérêt pour le joueur sans engagement) et prise de décision (intérêt pour le joueur donc négociations lancées). Avec le temps et les expériences le DS réussi à classer les négociations selon le profil de l’agent en face pour savoir comment conduire les négociations. Tout ça n’empêche cependant pas de voir de plus en plus d’agents qui rodent dans les bureaux des clubs comme s’ils étaient chez eux, ce qu’il faut éviter à tout prix selon l’auteur.

Le monde des négociations

Une fois les renseignements pris et une fois arrivé au contact formel évoqué ci-dessus, le club lance alors les négociations. Logiquement celles-ci arrivent après un long processus bien élaboré et structuré. La décision est prise, le club dégaine par son président, directeur général ou directeur sportif suivant les cas. Encore une fois, l’appel téléphonique à l’agent (une fois que le club est sûr à 100% qu’il est la personne à contacter) ne doit servir qu’à arranger une réunion entre les parties, le reste doit être expliqué en face à face. C’est parti pour plusieurs jours de folie ! Chaque chose à son importance, le lieu de la réunion, le temps, la préparation… Pour la rencontre d’un agent, le mieux serait de le faire au sein des bureaux du club pour ainsi pouvoir contrôler le plus de détails possibles comme les personnes présentes. Si le joueur assiste également à la réunion il faut alors trouver un endroit neutre par respect pour les joueurs du club et son équipe (sans oublier la discrétion et confidentialité). Le temps est également important donc il faut éviter de programmer d’autres actes avant ou après, la rencontre doit être le point de concentration totale. Pour finir il est également crucial d’être bien informé sur les personnes qui seront en face de nous.

Crédit : Intrafútbol

Valentín conseille de s’adapter au style de négociation de l’agent ayant, au préalable, désigné une étroite fourche de négociations. Place aux techniques de négociations, il faut commencer par offrir un peu au-dessus du point de bénéfices maximal possible et poursuivre sans jamais dépasser notre limite qui sera le point de rupture (quand la transaction n’est plus rentable). Pour cela il est indispensable d’avoir calculer à la perfection ces deux marges avant la rencontre. Savoir lire la communication non verbale est important pour déchiffrer la position de notre « adversaire » de table à chaque proposition. Autre point clé que relate le directeur sportif adjoint de l’OM et que l’on voit très souvent lors des périodes mercato : montrer à notre interlocuteur que l’on dispose d’autres alternatives en cas d’échec de cette négociation. Devant le joueur il peut être important de montrer un intérêt sur son entourage (études, famille…) pour lui vendre du rêve avec notre projet. Une fois tout ça mis sur la table la fin de ce processus doit être rapide. Si le club a fait une offre il doit alors éviter que celle-ci n’ait pas de réponse immédiate (accord, refus, contre-offre…). En cas d’accord mais de report de la signature finale, il est alors logique de signer un document qui reflète le consensus pour ainsi éviter toutes déviations futures. Valentín n’est pas partisan des offres par emails sans date de péremption, car celles-ci peuvent être utilisées pour faire pression sur d’autres clubs intéressés. Si tout se passe bien un accord doit être signé pour que les avocats de chacune des parties puissent rédiger les contrats.

Encore une fois cet article permet juste de mettre en lumière les souhaits d’Albert Valentín qui évoque ses méthodes du haut de ses 22 ans de carrière. On est surement très loin du modèle standard utilisé en majorité aujourd’hui alors que le monde du football parait de plus en plus rejoindre le côté obscur.

Nicolas Faure

@Nicommentator

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