Selon toute vraisemblance, Lucas Hernández portera la tunique rouge de la sélection espagnole. Quelques détails administratifs sont encore à régler pour l’acquisition de son passeport mais la décision du défenseur de l’Atlético de Madrid semble prise et l’Equipe de France risque bien de perdre l’un des meilleurs défenseurs de la prochaine décennie.
C’est quasiment acquis : Lucas Hernández jouera pour la Roja. Un choix fort et qui tranche avec celui a minima d’Aymeric Laporte qui, à force d’attendre et de tergiverser, a fini par quasiment tout perdre. Dragué par le sélectionneur Julen Lopetegui, l’ancien joueur de l’Athletic parti cet hiver à Manchester City a finalement répondu positivement à une convocation de Didier Deschamps en septembre 2016 pour pallier aux multiples forfaits. Apparemment, Lucas Hernández ne veut pas jouer les utilités en Bleu comme le natif d’Agen qui, non seulement, n’a pas disputé la moindre minute avec l’Equipe de France, mais qui en plus ne fait ouvertement pas partie des plans de DD pour la suite. Le sélectionneur lui a même « conseillé » de retenter sa chance avec l’Espagne qui avait été très insistante fut un temps. Bref, Laporte est grillé.
Plus attentif aux performances des Français de Premier League, la Dèche n’a jamais appelé non plus le défenseur polyvalent de l’Atlético de Madrid, capable de jouer dans l’axe et sur le côté gauche. Chez les Colchoneros, la concurrence est impitoyable avec les Uruguayens Diego Godín et José María Giménez et le Serbe Stevan Savic dans l’axe et le Brésilien Filipe Luis au poste de latéral. Pourtant, celui qui est simplement appelé Lucas en Espagne, s’est fait une belle place dans la rotation du Cholo Simeone et ce depuis plusieurs saisons maintenant. Régulièrement en Equipe de France depuis les moins de 16 ans, le Marseillais de naissance n’a jamais eu les honneurs des A. Un manque de reconnaissance qui aurait en partie causé son choix de jouer pour la Roja.

Footballistiquement 100% espagnol
Lucas et son frère cadet Théo ont beau être nés tous les deux à Marseille, leur histoire est intimement liée à l’Espagne. Leur père, Jean-François Hernandez, passé par l’OM et le Rayo Vallecano, a mis les voiles en Asie il y a une quinzaine d’années sans laisser d’adresse. Les deux frères ont débuté à un autre Rayo, celui de Majadahonda, ville située à 15km au nord-ouest de Madrid, avant d’entrer à la cantera de l’Atlético qui se trouve… à Majadahonda. Tout leur parcours footballistique est espagnol. Il n’est donc pas anormal de voir Lucas évoluer un jour avec la tunique de la Roja. La question pourrait également se poser à Théo d’ici quelques mois, s’il parvient à confirmer les espoirs placés en lui lors de sa saison à Alavés.
Forcément, le comportement de Lucas à l’égard de l’Equipe de France peut paraître hypocrite. En effet, s’il se sent Espagnol comme il l’a clairement affiché la semaine dernière, pourquoi avoir porté le maillot bleu en sélection de jeunes ? Et pourquoi avoir attendu ses 22 ans pour enfin obtenir son passeport au blason « Plus Ultra » ? On peut toujours blâmer ce revirement mais le règlement FIFA est ainsi fait et les changements de nationalités sont devenus monnaie courante. Mais hormis cela, le choix de Lucas Hernández est on ne peut plus logique. En comparaison, la décision d’Antoine Griezmann de jouer pour les Bleus pourrait prêter à polémique en Espagne. Après tout, c’est bien l’Espagne qui lui a permis de mettre un pied dans le football professionnel, lui qui avait été viré de bon nombre de centres de formation pour son physique trop fluet.
Doublure de Jordi Alba au Mondial ?
Décider de porter le maillot la Roja est une chose, y jouer en est une autre. Si on imagine que Julen Lopetegui a offert des garanties à Lucas Hernández, quel sera le rôle du défenseur ? A l’heure actuelle, que ce soit dans l’axe ou sur le côté gauche, il n’a aucune chance. Sergio Ramos, Gerard Piqué et Jordi Alba sont évidemment indéboulonnables. Mais sur le banc ? En l’espèce, le sélectionneur n’a pas trop de possibilités à ce poste. Alberto Moreno était présent dans la dernière convocation en novembre mais joue relativement peu à Liverpool (1911 minutes cette saison en championnat et en Ligue des Champions), Marcos Alonso n’a pas été appelé malgré ses performances à Chelsea et José Luis Gayà, même s’il est titulaire indiscutable à Valencia, n’a pas assez d’expérience européenne. Si on ajoute à cela sa polyvalence et sa connaissance du jeu espagnol, Lucas Hernández peut tout à fait prétendre à une place dans les 23 au Mondial en Russie, d’autant qu’il offre de fortes garanties sur le plan défensif. Sur le long terme, avec les retraites prochaines de Sergio Ramos (2020) et de Gerard Piqué (2018 pour le moment), l’Espagne a besoin de défenseurs centraux. Ce n’est pas morne plaine mais, par exemple, les jeunes Jorge Meré et Jesús Vallejo n’ont pas encore acquis le niveau du Colchonero. A l’heure du choix, Lucas Hernández a privilégié sa patrie d’adoption. Par sentiment ou par calcul, au fond peu importe. Mais une chose est d’ores et déjà certaine : la France vient de louper un sacré crack en devenir.
François Miguel Boudet