Real Madrid – Espanyol : De Zamora à Asensio, quand la capitale et Barcelone savent s’entendre

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Si le Real Madrid et le FC Barcelone sont des rivaux de longue date, l’antagonisme n’existe pas entre la Casa Blanca et l’Espanyol. Au contraire, une cinquantaine de joueurs ont porté les deux maillots. Des liens qui remontent à près d’un siècle.

La Catalogne est une autonomie des plus complexes et les citoyens attachés à la bannière rouge et or de l’Espagne sont au moins aussi nombreux à ceux qui rêvent d’indépendance. Par son nom, l’Espanyol dont le nom a été catalanisé officiellement en 1995 (jusqu’alors on écrivait Español) appartient à la première catégorie citée. Ce n’est finalement pas un hasard si les Pericos entretiennent des liens étroits avec le Real Madrid, club représentant l’Espagne au sens large du terme. Depuis 1930, une cinquantaine de joueurs a revêtu les deux maillots. Treize ont fait directement le chemin Espanyol-Real Madrid, 16 ont fait la route inverse. Pourtant, il n’y a quasiment pas de littérature sur le sujet. On ne peut donc formuler que des hypothèses sur les rapports entre les deux clubs, sachant qu’aucun accord écrit n’existe à l’heure actuelle.

Des joueurs historiques pour sceller les liens

Le premier joueur à avoir été Merengue et Perico est une légende : Ricardo Zamora. Surnommé « El Divino », il est l’une des premières stars du football espagnol. En 1930, il quitte l’Español et rejoint le Madrid FC pour un montant de 100.000 pesetas, un record à l’époque. Formé chez les Blanquiazules, Zamora avait entre-temps porté les couleurs du Barça pendant 3 saisons (1919-1922) avant de revenir dans sa première maison. Jusqu’au début de la Guerra Civil en 1936, le gardien a été le dernier rempart du club de Chamartín. Zamora a fait l’objet de deux longs métrages en 1926 (« Zamora se marie enfin ») et 1942 (« Campeones »), a une place à son nom à deux pas de l’Estadio de Sarrià dont on vient de commémorer les 20 ans de la destruction et le trophée remis au gardien qui a encaissé le moins de buts de la saison porte son nom. Un monument.

Mais dans ce premier XXe siècle, Zamora n’est pas seule légende espagnole et perica à porter le blanc immaculé. Josep « Pitus » Prat a endossé le maillot de l’Español de 1928 à 1940. L’attaquant a été le tout premier buteur de l’histoire de la Liga, en 1929. Prat quitte la Catalogne après une victoire en Copa del Rey, même s’il n’a pas joué la finale. A 29 ans, le même âge que Zamora, il rejoint le Real Madrid, avec nettement moins de succès que son aîné. A peine 5 petits matches. Mais le sillon est désormais bien tracé.

Cependant, pour bien montrer que le trajet ne se fait pas uniquement dans un sens, il faut une contrepartie. Et celle-ci est de taille. Il s’agit de Don Alfredo Di Stéfano. En 1964, « la Saeta rubia » souffle ses 38 bougies et fait durer le plaisir, après avoir inscrit 308 buts avec les Vikingos. Soixante matches et 14 buts : cela relève de l’anecdote en comparaison à sa carrière majuscule mais c’est bien chez les Pericos que l’un des plus beaux joueurs de l’Histoire du football s’est retiré.

L’Espanyol, une valeur sûre de Liga

Iván Helguera

Depuis 1929 et la création de la Liga, l’Espanyol de Barcelone n’a manqué que 4 saisons en Primera (1962-63, 1969-70, 1989-90, 1993-94). Aussitôt descendu, aussitôt remonté. Cette stabilité sportive est un immense avantage à plus d’un titre. D’une part, cela permet aux jeunes pousses de grandir dans une atmosphère protégée du trouble médiatique. D’autre part, c’est la certitude de jouer dans un style espagnol, comme son nom l’indique. Cette saison, 20 joueurs de l’effectif sont Espagnols. Forcément, le Real Madrid est intéressé par les services que peuvent rendre les Pericos. Proposer des joueurs en devenir qui ont la quasi-certitude d’évoluer au plus niveau pour se faire les dents, c’est un temps considérable de gagné. Ça l’est d’autant plus que l’Espanyol possède une très bonne cantera qui n’a pas à rougir face à la Masia du frère honni blaugrana. En 1999, le Real Madrid a par exemple déboursé 12 M€ pour un milieu défensif très prometteur. Son nom : Iván Helguera. Le célèbre binôme de Claude Makelele dans le doble pivote de Vicente Del Bosque est resté 8 saisons, avec un succès notoire, au point qu’on ne l’imagine pas avec un autre maillot sur le dos

Cette saison, Quique Sánchez Flores dispose de 7 canteranos dans son groupe. De son côté, La Fábrica a fourni quelques joueurs à l’Espanyol, comme à de nombreux autres clubs de Liga, le centre de formation merengue étant le plus prolifique du Royaume. Les derniers exemples les plus célèbres sont Juanfran Torres, actuellement à l’Atlético de Madrid, José Callejón qui est même revenu à Santiago-Bernabéu avant de prendre son envol au Napoli, Lucas Vázquez et Marco Asensio qui sont, eux, parvenus à se faire une place à la Casa Blanca. Le dernier exemple en date d’appelle Mario Hermoso. Merengue pendant une décennie, le défenseur central vient de signer 3 ans à l’Espanyol et a déjà été 4 fois titulaire cette saison. « Je dois beaucoup au Real Madrid, pratiquement tout de ce que j’ai appris je le dois à la formation que j’y ai reçu, a expliqué le joueur dans les colonnes de Marca à la veille de ses retrouvailles. Au niveau personnel et au niveau professionnel, on t’enseigne des valeurs pour toute la vie et sportivement, tu es entouré de grands professionnels qui te font devenir footballeurs ».

Ce soir, ils seront 5 sur la feuille de match à avoir porté les deux maillots : Lucas Vázquez, Marco Asensio et Kiko Casilla côté Real Madrid (les trois ont fait le chemin direct), Mario Hermoso et Diego López côté blanquiazules. Enfin, Javi Puado a quitté la cantera de l’Espanyol cet été pour rejoindre le Castilla, la pépinière vikinga dirigée par Santiago Solari, en Segunda B. Finalement, Madrid et la Catalogne peuvent s’entendre et se rendre service quand tout le monde y gagne !

François Miguel Boudet
@fmboudet

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