Immense joueur devenu député, Romario a concentré ses efforts parlementaires au sein d’une commission d’investigation sur la corruption au sein du football brésilien. Passé du Parti Socialiste à Podemos, un parti « qui a plus à voir avec le Yes we can d’Obama que du Podemos espagnol », O Baixinho s’est confié dans un livre intitulé « Un oeil sur le ballon, un autre sur les dirigeants » qui met en lumière les pratiques des responsables auriverde. Dans les colonnes d’El País, le champion du monde 1994 évoque l’état de la fédération, l’arrivée de Neymar au Barça et ses souvenirs au sein de la Dream Team de Johann Cruyff. Sélection de ses meilleures réponses.
« Jamais venu à l’esprit qu’il existait une telle mafia » : L’enquête de la Commission parlementaire d’investigation sur le football a mis en lumière beaucoup de choses que les gens ne connaissaient pas, moi compris. La CBF (la fédération brésilienne, ndlr) a vendu la Seleção aux enchères. En analysant les contrats avec diverses entreprises, nous arrivons à la conclusion que les matches amicaux que la CBF organise n’ont aucun objectif technique et n’ont pas l’intention d’améliorer le niveau. L’unique objectif est de gagner de l’argent ou, mieux, de faire en sorte que les dirigeants de l’argent. Le pire de tout c’est que ce ne sont pas toujours les meilleurs joueurs qui sont convoqués. La CBF convoque ceux qui lui convienne. De nombreux joueurs, après deux ou trois convocations, sont transférés à l’étranger via des opérations millionnaires. (…) Je ne peux pas affirmer que les derniers sélectionneurs étaient au courant. Ce que je peux dire en revanche, c’est qu’il existe des contrats avec des entreprises déterminées qui obligent la CBF à convoquer les joueurs les plus connus, qui ne sont pas toujours les meilleurs. (…)

Au cours de ma carrière, ça ne m’est jamais venu à l’esprit qu’il existait une telle mafia, ce cartel au sein de le CBF. (…) Il est déjà plus que prouvé que l’actuel président et les deux derniers ex-présidents de la CBF sont d’authentiques voleurs. Ce sont des personnes qui ont volé de l’argent, qui ont fait des malversation avec les fonds de l’entité et qui se sont enrichis de façon illicite. Il faut arrêter avec ce repaire de voleurs. (…) Non seulement Marco Polo Del Nero (l’actuel président de la CBF, ndlr) est un menteur mais, en plus, c’est une crapule. Tout ce qui apparaît dans le livre est prouvé par l’enquête que nous avons mené. Nous sommes parvenus à ouvrir la caisse noire de la CBF. Les avocats de la CBF ont essayé d’empêcher la publication du livre à São Paulo, mais ils ont perdu. (…) Il y a peu, un représentant de l’ambassade espagnole est venu à mon bureau pour m’inviter de la part du juge fiscal général espagnol à venir témoigner à Madrid sur tous les faits qui intègrent le rapport que je leur ai envoyé. Je leur ai répondu que j’étais à leur disposition. (…) Sandro Rosell est un voleur, tout comme Ricardo Teixeira (ex-président de la CBF). Il est tellement corrompu comme président de la CBF et Ángel María Villar de la Fédération espagnole de football (tous deux sont incarcérés). Tout arrivera. Ceux qui, ici, ne sont toujours pas détenus, le seront. Les mises en détention de dirigeants du monde entier ont déjà exercé une pression sur les autorités brésiliennes qui se bougent et enquête sur les dénonciations que nous avons faites, chose qui n’était pas arrivée il y a un an. J’espère qu’ils arrêteront rapidement ces fils de p***. (…)
Ça me fait de la peine de voir que le FC Barcelone est cité aux informations à cause de tous ces problèmes. Pour moi, le Barça est le meilleur club du monde. Je leur suis reconnaissant de tout ce qu’ils ont fait pour moi quand je jouais là-bas. Les corrompus qui ternissent l’histoire d’une entité comme le FC Barcelone, tels que Sandro Rosell ou le président de la Fédération espagnole de football, doivent aller en prison. Le lieu des corrompus et les voleurs, quels qu’ils soient, c’est la prison ».
« Neymar, difficile de dire si ça été une bonne décision » : « Cela fait quelques années que je ne vois pas beaucoup de football. Mais le Barça a perdu avec le départ de Neymar. Dans la Liga espagnole, seulement deux équipes ont l’habitude de lutter pour le titre, le Barça et le Real, même si des fois il y a Valencia ou l’Atlético de Madrid. (…) C’est difficile de dire si ça a été une bonne décision. Pour ce que j’ai lu et entendu, Neymar est heureux au PSG et j’espère qu’il le soit encore davantage. Il n’y a rien de mieux pour un joueur que de se sentir heureux dans son environnement de travail. Mais je crois que ce sera difficile pour lui d’être le meilleur joueur du monde au PSG qu’à Barcelone. Neymar a déjà atteint un niveau auquel il pourrait gagner ce prix mais, depuis le transfert, je crois que ça lui sera plus difficile ».

« Je suis parti du Barça parce que j’avais besoin de rentrer dans mon pays et vivre parmi les miens » : « Moi, j’ai simplement quitté le Barça pour Flamengo pour être plus heureux. J’ai laissé la meilleure équipe du monde pour jouer dans la meilleure d’Amérique latine. (…) J’ai toujours été heureux à Barcelone. Mais après le Mondial 1994, par la manière dont les gens m’ont reçu 24 ans après le dernier titre mondial, j’étais sûr que je serais beaucoup plus heureux à Rio de Janeiro. Je ne regrette pas d’avoir quitté le Barça. Si c’était à refaire, je le referais. (…) Non, je n’ai pas eu de problème avec Johan Cruyff, c’est tout le contraire. Il a été la première personne avec qui j’ai parlé quand j’ai décidé de partir. Vraiment, je ne suis pas revenu au Brésil pour gagner plus d’argent, je suis rentré pour gagner moins. Le plus important était mon bonheur. Je voulais être près de mes enfants, de mes parents. Ça pèse plus que l’argent. Le Barça m’a toujours traité de la meilleure des façons. Je suis parti simplement parce que j’avais besoin de rentrer dans mon pays et vivre parmi les miens. Je n’ai jamais eu de problèmes avec Cruyff, l’afición ou mes coéquipiers. Je remercie les supporters pour toute l’affection qu’ils me portent. Ma première année à Barcelone a été bonne. Rio a commencé à me manquer après le Mondial. Je devais revenir au club à une date déterminée mais j’ai décidé de rester 20 jours de plus. A ce moment-là, je me suis rendu compte que je ne pouvais être loin de Rio.
Quand je suis rentré, Cruyff est venu me parler et j’ai payé une amende pour le retard. Malheureusement, les joueurs n’ont pas apprécié ce qui s’était passé, mais nous avons eu une réunion et tout a été réglé. Ils m’ont dit ce qu’ils pensaient et moi aussi. Et voilà. Je n’ai jamais eu d’ennemis à Barcelone. Avec Stoitchkov, on a eu une relation très étroite. Je ne sais si les autres étaient mes amis, j’avais des relations normales avec tous. (…) Pour être honnête, je n’ai jamais remarqué cet aspect chez Guardiola. Mais comme joueur, il démontrait qu’il était très différent de ceux qui jouaient dans la même position. C’était l’un des meilleurs du monde. (…) J’ai eu plusieurs bons entraîneurs mais Cruyff était le meilleur de tous. Qu’il ait été l’un des meilleurs joueurs de l’Histoire a facilité la convivencia dans le vestiaire. Tous le respectaient et lui comprenait parfaitement les besoins des joueurs. Et par-dessus tout, il donnait des exemples pratiques sur le terrain. Il prenait le ballon… pa, pa, pa… il te montrait ce que tu devais faire. Très peu d’entraîneurs ont cette capacité. (…)
Bien sûr que je devancerais Messi et Cristiano Ronaldo pour le Ballon d’Or. Avec tout le respect que j’ai pour eux, je les dépasserais en termes de frappe et dans la position l’intérieur de la surface. Sur ces points, j’ai pas mal d’avance.
Propos traduits par François Miguel Boudet