Mentor de Sergio Ramos à Séville et médecin, Pablo Alfaro arrive au chevet de la UD Ibiza

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A Ibiza, la vie suit tranquillement son cours. Les oiseaux de nuit ne sont pas encore arrivés et le soleil frappe les superbes plages de cet île aux allures paradisiaques. Cependant, dans le petit stade municipal de Can Misses, tout n’est pas aussi tranquille. Amadeo Salvo a encore mené un recrutement ambitieux mais Andrés Palop, pourtant auteur d’un bon travail, a été congédié et Pablo Alfaro nommé en remplacement. A 8 journées de la fin du championnat de Segunda B, la UD Ibiza surpasse les attentes mais cela ne satisfait pas son président. Mais où vont les insulaires ? 

L’été dernier, l’effervescence était totale à Ibiza. Le petit club local, propriété de la famille Salvo depuis quelques temps maintenant, passait à la vitesse supérieure. Malgré une défaite en finale d’accession en Segunda B, le club était tout de même monté au troisième échelon du football espagnol, à un étage du football pro. Comment ? Après l’achat d’une place par l’ancien président du Valencia C.F ! En plus de ce coup de force, Salvo a fait venir Marco Borriello et annoncé vouloir jouer la première partie de tableau, voire la montée à court terme. Cette annonce a excité les journalistes étrangers, plus que les médias locaux. Quelques mois plus tard, la UD Ibiza a encore une fois beaucoup changé et l’ambition de Salvo, qui a fait du bien au club, semble maintenant lui faire du mal. Retour sur les derniers choix du président.

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Après des débuts compliqués sous l’égide de Toño Mendez, la légende Andrés Palop a été appelé pour continuer d’entretenir le côté bling bling du projet mené par Amadeo Salvo, tout en essayant de le faire basculer du bon côté. Depuis qu’il a repris le club, c’est le souhait de l’actuel président. Ibiza doit apprendre rapidement, se remettre en question constamment et grandir, vite. Les investissements sont conséquents, que ce soit sur le marché des transferts et du côté des infrastructures. Cette saison par exemple, été et hiver cumulés, 29 joueurs ont signé à la UD et 27 joueurs l’ont quitté. Une ambition qui a séduit Palop mais qui aura très certainement causé sa perte.

Andrés Palop a apporté toute son expérience et sa gestion des attentes. Misant sur un jeu plutôt ennuyant et un bloc compact, Ibiza a enchaîné les bons résultats. Rapidement même, les insulaires ont basculé dans la première partie de tableau. Hormis le 6-0 face à Cartagena, une des meilleures équipes du groupe et de toute la Segunda B, Ibiza n’est jamais surpassé. Bien sûr, le jeu déployé n’est pas le plus sexy et le double pivot mis en place par l’ancien gardien de Séville nuit fortement aux velléités offensives d’Ibiza. Néanmoins, les résultats sont là. Après une victoire face à Melilla, le club se met même à rêver d’une montée. Le stade se remplit et surtout les animations en tribunes sont de plus en plus nombreuses. Pourtant, après plusieurs matchs nuls consécutifs, Palop est relevé de ses fonctions. La raison ? Un effectif qui doit digérer un mercato hivernal encore conséquent et une zone de promotion à plus de 8 points. Les problèmes semblent profonds à Ibiza. Palop est devenu le 7e entraîneur licencié par Salvo en à peine 3 saison à Ibiza.

Pablo Alfaro, pour continuer de faire grandir Ibiza  

Comme Andrés Palop, le docteur Pablo Alfaro est un véritable mythe du Sevilla FC. En Andalousie, le défenseur qui a pris le petit Sergio Ramos sous son aile est un des joueurs les plus exclus de Liga, notamment battu par… Sergio Ramos. Portant le collier de barbe avec élégance, Alfaro a un chant à sa gloire à Nervión et surtout il représente parfaitement comment Séville est passé de la Segunda à la Ligue Europa en quelques années. À l’époque sorti de sa torpeur grecque par Monchi, Alfaro est un bon footballeur mais il a surtout de très gros huevos, chose très importante dans l’esprit de Joaquín Caparrós, l’entraîneur qui a remis Séville sur de bons rails sur le terrain quand Monchi faisait le ménage dans les bureaux.

Après sa retraite sportive, Alfaro qui a aussi un doctorat en médecine n’a jamais vraiment été retraité. Après avoir donné des cours de management et été consultant pour plusieurs clubs, il a même passé ses diplômes d’entraîneurs. Entre temps, Pablo a même été journaliste. Passé sur les bancs de plusieurs clubs en Segunda B, il connaît très bien cette catégorie. Alternant le très bon et le très mauvais, il a beaucoup plus d’expérience que Palop qui n’avait qu’une saison dans le costume d’entraîneur avant d’arriver à Ibiza. Le choix de Salvo est clair : il ne veut pas perdre de temps. Il a senti que la réussite n’était plus là avec Palop et il n’a pas voulu laisser la situation se larver. Avec Alfaro, il cherche autant le côté guerrier du joueur que l’aspect taiseux de l’entraîneur. Le directeur sportif du club l’a bien expliqué lors de la présentation d’Alfaro : « Nous recherchions un leader, nous avons besoin de leadership dans les vestiaires, en dehors de son niveau tactique. Nous pensons que cela nous apportera beaucoup de choses et nous espérons que cela sera remarqué sur le terrain . »

Derrière sa réputation de fou furieux en tant que joueur, Alfaro a longuement mûri son style d’entraîneur. Il sait qu’à ce niveau, on ne peut pas vraiment mettre en place une certaine idée de jeu. Les entraîneurs bricolent avec ce qu’ils ont sous la main. Cela tombe bien, le matos est plutôt bon à Ibiza. Même si Borriello a raccroché les crampons pour devenir dirigeant du club, Alfaro pourra se reposer sur des noms connus comme Armenteros, des joueurs habitués à ce niveau comme Cirio et de nombreux jeunes promis à un bel avenir. Là où Alfaro devient intéressant, c’est dans son body language. Comme il l’a répété dans plusieurs médias, il veut inculquer du calme à son groupe. Malgré son côté sanguin, il essaye au maximum d’être « passif » sur le banc. Pour faire simple, il est le contraire d’un garçon comme Unai Emery.

Au journal La Paradinha, Pablo Alfaro est revenu sur son style et ses méthodes : « Je suis l’un de ceux qui pensent que la principale qualité qu’un entraîneur devrait avoir est la capacité de savoir s’adapter aux joueurs qu’il a, au club dans lequel il se trouve, aux médias dont il dispose et, à partir de là, développer un travail, une idée générale. L’essentiel est de s’adapter et de le faire rapidement. »

Il poursuit « Je pense aussi qu’un coach doit transmettre le calme. Lorsque vous avez été joueur, vous êtes conscient qu’il y a des moments dans un jeu où vous regardez le banc et observez qu’il existe un mister qui ne fait souvent que bouger les bras et donner des instructions et ne les transmet pas bien car, logiquement, cela ne vous dit rien. Il y a des moments où il faut être plus calme, plus tranquille, se rendre compte de ce qui se passe et essayer de mettre les solutions de l’extérieur. » 

Et maintenant, on joue quoi ? 

Alors que la logique de changer tout à chaque fenêtre de transfert avait permis à Ibiza de grandir à vitesse grand V, elle semble avoir coupé la dynamique du club cet hiver. Palop avait réussi à construire un groupe cohérent et qui savait où il allait. Bien sûr, il manquait un 9 capable de claquer de nombreux buts. Les stats le montrent bien : Ibiza a une superbe défense (moins d’un but encaissé par match) mais marque aussi très peu (moins d’un but par match). Rodado, le meilleur buteur du club, n’en est qu’à 8 unités en près de 30 matchs. Derrière ? La légende Cirio avec 5 buts.

On pourrait donc penser que la direction se serait mis en quête simplement d’un buteur pour ne pas tout chambouler,  mais Ibiza a signé pas moins de 8 joueurs, à tous les postes et a compté 7 départs. Ils sont moins d’une dizaine à avoir connu le club en Tercera la saison dernière et Cirio est un des seuls à encore jouer très régulièrement. Ces changements ont tout chamboulé et l’équipe ne réussit plus grand chose. En plus de ne toujours pas marquer, Ibiza ne défend plus très bien et n’avance plus. Alfaro n’a rien changé et, pire, alors que top 4 n’était qu’à 8 points lors du départ de Palop, il est maintenant à 10 unités. Ibiza est toujours dans la première partie de tableau mais semble déjà hors course pour la montée. Cependant, son style d’entraîneur bricoleur qui a déjà réussi dans de nombreux clubs comme Mirandés ou encore Pontevedra inspire l’optimisme. Alfaro est connu et sait s’adapter, deux qualités indispensables pour réussir avec Amadeo Salvo.

De la réaction à la planification pour Ibiza ? 

Se pose maintenant une question : que vont faire Ibiza et Salvo ? Alors que Palop, qui faisait du bon travail, a été mis hors du club parce qu’il ne semblait pas capable de faire monter le club, Alfaro ne fait pas mieux. La UD paraît naviguer à vue. Par exemple, Toño Mendez, un des entraîneurs les plus importants dans la montée en puissance du club, est revenu dans le staff du nouveau coach. Après avoir avancé très (trop ?) rapidement, Ibiza se met peut-être enfin à préparer et planifier. La méthode de Salvo a bien marché mais il joue très souvent avec le feu. L’équipe baléare n’a pas de passif et un simple saut de chaîne pourrait avoir des effets néfastes sur son développement, en témoigne le dernier mercato.

Pour autant, même si de nombreux prêts vont se terminer en juin, Alfaro peut travailler avec un groupe étoffé et préparer au mieux la saison prochaine. Même si la maxime du club est « Le sommet », la planification est très importante mais n’a jamais été ni faite ni pensée à la UD, surtout qu’il reste encore 9 journées. Même si les écarts sont importants mais pas définitifs, Alfaro peut encore réussir un coup de maître comme cerise sur le gâteau, lui l’homme qui a connu de nombreux entraîneurs de renom dans sa carrière de joueur : Radomir Antic, Joaquín Caparrós et Johan Cruyff. Alors que joue Ibiza ? Personne ne le sait vraiment, mais la UD pourrait faire une croix sur cette saison pour mieux anticiper la suivante. L’équilibre du club est fébrile. Une chose est sûre : Ibiza veut grandir et s’en donne les moyens. Avec l’arrivée du docteur Alfaro, le club devrait aussi se donner du temps pour mieux avancer. Les petites divisions ne font pas de cadeaux à ceux qui veulent aller trop vite.

Benjamin Bruchet 

@BenjaminB_13

 

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