Williams ou Muniain, à qui doit profiter le jeu de l’Athletic Bilbao ?

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L’Athletic Bilbao dispose dans ses rangs de deux joueurs de qualité supérieure : Iñaki Williams et Iker Muniain. La question est de savoir comment les faire jouer ensemble.  

À mesure que le temps passe, les illusions autour d’Iker Muniain s’estompent. Le n°10 basque a beau avoir un talent exceptionnel et être dans la fleur de l’âge, il ne deviendra pas le joueur sur lequel tous les fantasmes du football espagnol avaient été projetés. Il ne jouera ni au Real ni au Barça, et ne sera pas l’un des éléments centraux de la Sélection. Freiné par deux grosses blessures consécutives, il a perdu un temps précieux dans sa carrière. En comparaison, Ander Herrera, Juan Mata ou Thiago (voire Parejo) ont connu un destin plus florissant, eux qui faisaient partie du milieu de terrain de l’équipe d’Espagne U21 championne d’Europe en 2011, aux côtés de Muniain.

Pour Iñaki Williams, la situation est similaire. Ce ne sont pas les trahisons de son corps qui l’ont handicapé, mais plutôt une interrogation croissante quant à son meilleur poste : cinq ans après ses débuts avec l’équipe première, les débats sont toujours vifs quant à la place qu’il doit occuper sur le terrain. En Sélection, il a été relégué derrière Marco Asensio, Lucas Vázquez ou même Suso dans la hiérarchie nationale. La génération 93/94 des ailiers, qui englobait Williams, Deulofeu et Jesé n’a pas tenu toutes ses promesses.

La bonne nouvelle pour les supporters de l’Athletic, c’est qu’ils peuvent voir évoluer sous leurs yeux deux joueurs formés au club (ils sont meilleurs amis qui plus est), appelés à porter la structure offensive de l’équipe sur leurs épaules. Reste à savoir comment…

Remplacer Aduriz

Si l’Athletic Bilbao se débrouille pour assurer la relève en défense et au milieu malgré sa politique de transfert restrictive, l’attaque est délaissée faute de profils intéressants sur le marché. Résultat, Aduriz subit les affres de l’âge tandis que l’équipe est tourmentée par le manque de goles. Comme on dit en espagnol, « il manque du but » à l’Athletic. Pour remédier à ce problème de la plus haute importance, l’entraîneur Berizzo a replacé Williams à la pointe de l’attaque. Loin de son côté, il apprend à jouer dos aux cages et à faire des courses susceptibles d’ouvrir des espaces à ses coéquipiers.

Crédits : Afrique foot – RFI

Pourtant, ce poste ne maximise pas ses qualités, bien au contraire, comme dirait DD. Plus rapide que l’immense majorité des autres joueurs de Liga, il s’est révélé sur le côté, mettant à mal dès que possible les latéraux adverses. En pointe, il ne peut plus courir de la même manière, au sein d’une équipe cherchant à contrôler le jeu un minimum. Il ne peut pas non plus déborder l’adversaire, et conduire le ballon sur de longues distances. Sa vitesse, il n’est plus apte à l’utiliser autant qu’avant, exception faite des contre-attaques, une filière de jeu toutefois peu utilisée par l’Athletic. Ce fut le cas au Camp Nou, où il a démontré être un élément décisif n’ayant besoin de rien d’autre que de ses jambes pour créer le danger à terrain ouvert.

À titre d’exemple, un autre joueur a connu un replacement similaire au cours des dernières années, mais pas pour les mêmes raisons : nommons Cristiano Ronaldo. Si l’expérience a fonctionné pour le Portugais, c’est qu’il a développé un habitus d’avant-centre, bien aidé par une inclinaison naturelle vers les cages adverses. Pour Williams, la tâche est plus compliquée, car il n’a jamais été un ailier très productif en terme de buts marqués. À l’aube de la saison, il déclarait: « mon objectif cette année, c’est de marquer plus de buts« . Car jusque-là, ses chiffres n’emballent pas : sa meilleure marque se situe à huit réussites, vestige de la saison 2015/2016. Présentement, il doit se transformer du jour au lendemain en un marqueur, et ce en dépit d’une finition laissant à désirer. Malgré les progrès effectués dans le jeu, cette nouvelle position semble l’amputer de ses meilleures qualités. Cela se traduit par une difficulté supplémentaire pour l’Athletic, devant faire face à 13 ou 14 équipes possédant de meilleurs avant-centre qu’elle, ce qui inclut Getafe, le Rayo ou Girona.

Le côté gauche, propriété de Muniain

Une solution fréquemment évoquée pour (re) trouver le meilleur Williams, serait de le faire jouer à gauche. Ainsi, il pourrait s’adonner à son activité de débordement avant de repiquer et de se retrouver sur son bon pied, le droit. Dans l’histoire, il pourrait même augmenter son nombre de réalisations. Pourtant, le problème du buteur ne serait toujours pas résolu. Sans compter que le côté gauche, c’est celui de Muniain…

Muniain n’a rien d’un ailier. Ou du moins, plus le temps passe et moins il ressemble à l’ailier qu’il a pu être durant ses premières années au plus haut niveau. Sur la gauche de l’attaque des Leones, il repique sans arrêt vers l’intérieur du jeu. Une aubaine pour son latéral, Yuri Berchiche, qui peut laisser libre court à ses velléités offensives dans l’espace laissé libre par Muniain. S’ajoute à ce duo la présence du relayeur gauche pour offrir une solution au centre si Muniain décide de rester un peu écarté. De ce fait, le côté gauche de l’Athletic concentre l’essentiel de la production offensive. L’intronisation de Williams dans cette parcelle du terrain semble alors compromise. Cela bénéficierait au joueur, mais pas à Yuri ni à l’animation offensive de l’équipe, qui perdrait en continuité dans ses actions. À moins que…

À moins que Muniain retrouve une place de numéro 10, le poste où il peut-être le plus profitable à son équipe. Son entraîneur déclarait à son sujet « qu’il peut jouer sur l’aile, mais sa qualité et sa manière de comprendre le jeu font qu’il est idéal pour jouer à l’intérieur, en milieu offensif ». Non-contraint par la ligne de touche, il peut se muer en directeur du jeu des siens, tel un milieu de terrain, en y ajoutant son inclinaison de toujours vers le but. Cette dernière fait d’ailleurs de lui le meilleur buteur de l’Athletic cette saison (3 buts). Un scénario déjà vu à quelques reprises cette saison, et qui semble clair dans l’esprit du coach rojiblanco. Ce repositionnement pourrait profiter à Williams. L’idée serait d’attirer les adversaires à l’intérieur en s’associant, avant de lancer le véloce ailier sur son côté gauche. Séduisante sur le papier car elle permettrait aux deux stars basques de s’exprimer au maximum, cette alternative se heurte au trou qui serait laissé en position de buteur, désertée par Williams.

Crédits : scoopnest.com
Une saison de transition ?

S’achemine-t-on vers une saison où Williams occupera le poste d’avant-centre malgré ses carences, dans l’attente de l’éclosion d’un nouvel attaquant de métier ? Kuko Ziganda, le peu regretté míster de l’Athletic la saison passée avertissait déjà du temps nécessaire au joueur hispano-ghanéen : « C’est un processus qu’il doit mener à bien, et qui est naturel. C’est un attaquant différent d’Aduriz, qui lui est un franc-tireur, n’ayant besoin que d’une ou deux occasions pour marquer. Willy en a besoin de plus, mais il est capable de s’en créer. Il a beaucoup de vitesse, de vitalité et d’énergie« .

Comme alternative numérique, Asier Villalibre pourrait être l’homme du renouveau, sans pour autant que l’aspect qualitatif ne soit satisfaisant. Reste l’option de continuer à se reposer sur Aduriz, qui marquera bien quelques buts. Tous ces problèmes ont le mérite de pointer un objectif clair : la nécessité absolue d’avoir un jeu abouti. Sans joueur capable de marquer à tout moment, quel que soit le niveau de son équipe, il va falloir s’appuyer sur un jeu mieux rôdé que jamais (comme le Real tiens). Berizzo a du travail !

Elias Baillif (Elias_B09)

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