La locomotive Atleti en manque de charbon

Analyse Atlético En avant Liga Santander

Equipe frisson des dernières campagnes européennes, l’Atleti était entré dans le top 3 espagnol avec violence et passion. Sauf que cette saison, les hommes du Cholo Simeone semblent en perte de vitesse. Simple coup de mou ou défaillance profonde ?

Avant Diego Simeone, l’Atlético de Madrid était dans une crise permanente. Toujours sur le fil, les matelassiers étaient connus en Espagne pour leur instabilité chronique à décevoir constamment, même avec des effectifs d’une qualité certaine. Cependant tout a changé avec l’arrivée du technicien argentin avec les résultats que tout le monde connaît : 2 finales de Ligue des Champions, un titre de champion, une Ligue Europa, une Copa Del Rey et 5 places sur le podium. Cette saison en revanche, l’Atleti déçoit. Incapables de produire une semblant de jeu, les hommes du Cholo sont en train de devenir une caricature d’eux-mêmes.

The boring Atleti

Comptablement, les résultats des Madrilènes cette saison ne sont pas catastrophiques avec 46 points en 21 journées, une petite défaite et une place de dauphin. Sauf que derrière cette « réussite » se cache une faiblesse offensive criante et un club enfermé dans ses fondamentaux. 9 petits buts concédés pour seulement 32 marqués, c’est peu. 1.4 buts marqués en moyenne à domicile, là aussi c’est peu. L’Atleti semble souvent incapable de tuer les matchs, se contentant d’ouvrir la marque pour attendre son adversaire et souffrir. Les Colchoneros se reposent aussi régulièrement sur Jan Oblak, véritable mur cette saison. Même si les stats défensives sont en faveur de l’Atleti (meilleure défense du championnat), il concède près de 11 tirs par match, ce qui ne le place qu’en 6e position en Liga.

Même offensivement, ce que propose l’Atleti est faible, avec seulement 11 tirs par match, il se positionne dans un rythme offensif plus proche d’une équipe qui se bat pour son maintien qu’un candidat à la LDC. Ce tempo offensif est aussi bien loin des 13 tirs par match de la saison passée par exemple. C’est un glissement logique, les clubs savent comment contrecarrer les plans du Cholo et le jeu des Colchoneros manquent de spontanéité . On peut aussi parler de la campagne désastreuse en LDC : 5 petits buts en 6 matchs, une seule petite victoire, deux nuls face à Astana et une piètre 3e place. C’est un sentiment particulier que nous laisse cet Atleti, moins joueur, moins dominateur, plus froid mais aussi très souvent sur le fil, tenu par un je ne sais quoi de collectif qui permet à certains de se sublimer le temps d’un instant.

Crédits : thetelegraph.co.uk

Des flops et un effectif en manque de sang neuf

On le sait, même si un effectif est qualitativement au niveau, pour en tirer de la quintessence il doit se renouveler. Un effectif est un organisme vivant, il a besoin d’apport de sang neuf pour continuer à vivre, se renouveler et éviter aux joueurs de se reposer sur les acquis faute de concurrence. Cette concurrence manque cruellement cette saison à l’Atleti. Bien que peu enclin à faire tourner son XI titulaire, le Cholo pouvait s’appuyer sur 15 voire 16 joueurs de haut niveau. C’était même souvent les remplaçants qui tuaient les matchs. Sauf que ces 15/16 joueurs n’ont absolument pas changé depuis 2014, date de la dernière finale européenne du club.

Le XI de la dernière finale européenne de l’Atletico

Des 18 joueurs sur la feuille de match ce soir de mai 2016 à Milan, seul Tiago ne figure plus comme joueur de champ (il a rejoint le staff du Cholo). Derrière cette « stabilité » apparente, beaucoup de flops. Pour illustrer le problème de recrutement des Madrilènes on pourra citer les cas Guilherme Siqueira, Josuha Guilavogui, Raul Jiménez, Alessio Cerci, Luciano Vietto ou le plus emblématique, le cas Jackson Martínez. C’est simple, l’Atleti a gaspillé environ 150M€ sur bon nombre de joueurs qui n’ont jamais répondu aux attentes et qui ont été des flops retentissants.

Un épuisement général

Le style du Cholo est épuisant, sur le plan mental mais encore plus sur le plan physique. Les joueurs sont lessivés, mis dans le bain très tôt dans la saison avec une grosse préparation physique en avant-saison. L’exemple des arrivants vomissant ou complètement vidés après leurs premières séances d’entraînements dirigées par le Profe Ortega sont légion. Si on ajoute à ce style épuisant un manque de renouvellement criant on voit des cadres épuisés après 3 ans voir 5 ans sous les ordres du Cholo.

« Si tu restes, je resterai » selon Diego, Griezmann est resté cet été car lui même est resté.

Cette saison, on peut dire qu’El Niño Torres voire Gabi sont loin de leur meilleur niveau et ont clairement prolongé pour renvoyer l’ascenseur à un club qui leur a beaucoup donné, d’autant plus que le club était interdit de recrutement l’été dernier. Globalement c’est tout un effectif qui semble tirer la langue, las d’un style laborieux, épuisant et où les joueurs prennent peu de plaisir. Même si ce style a permis aux joueurs de vivre des gloires certaines, la fatigue commence à prendre le pas. Les cadres historiques que sont Diego Godín, Juanfran ou encore Filipe Luis, présents depuis l’arrivée du Cholo, sont aussi clairement émoussés.

crédtis : Dailyexpress.com

Une caricature d’eux même

Habitué à ne pas être une équipe qui régale offensivement, l’Atleti faisait quand même régulièrement le travail face aux « petites » équipes. C’était surtout face aux deux gros que l’équipe se mettait en mode tortue pour ramener au moins un point. Oui mais voilà, cette saison l’Atleti ne se contente que du minimum même face aux plus petites équipes. Incapables d’imprimer un rythme durant 90 minutes, les hommes de Simeone jouent sur leurs acquis. Souvent dépassés dans le jeu, ils ouvrent cependant régulièrement la marque pour ensuite fermer la boutique et ne plus toucher un ballon. Sans velléité offensive, privé de l’âme du Calderón, l’Atleti déçoit et se montre vulnérable comme face à l’Espanyol (défaite en fin de match) ou Girona (match nul après avoir mené) en Liga, comme face à Sevilla en Copa et comme face à Chelsea ou Qarabag en LDC . Bref les exemples de matchs où l’Atleti n’a pas su mettre le petit coup d’accélérateur pour se mettre à l’abri ou forcer un résultat sont nombreux. Bien que toujours en liste pour le podium en Liga, le contenu des matchs est souvent problématique. Les arrivées de la Bestia Diego Costa et du vacancier Vitolo Machín ne masqueront pas tous les problèmes des Rojiblancos.

Benjamin Bruchet

« Plus qu’une équipe, nous sommes une famille » Diego Simeone en 2015 pour El Pais.

L’Atleti semble incapable de changer de système, de style. La saison passée Simeone avait essayé de changer sa philosophie pour devenir un poil plus joueur. Résultat près de 9 points de retard sur Seville à la mi-saison, et un retour aux fondamentaux pour finir sur le podium à la fin. C’est un problème de taille et qui peut aussi expliquer les problèmes d’intégration des recrues. L’équipe ne s’ouvre peu, les joueurs donnent tout pour la famille, ils lui sont fidèle mais ensuite arrive de la lassitude du fait du manque de sang frais. Il est aussi compliqué de faire des choix durs dans une famille, cependant le club de Madrid a besoin d’un changement radical. Par exemple, le non départ de Griezmann cet été (qui a plus enfoncé la porte à un départ à l’état 2018 qu’autre chose) ou la réduction de contrat de Simeone pour ensuite le refaire prolonger montre bien un club coincé entre deux eaux. L’ambition d’être un top club, d’être le troisième plus grand club d’Espagne et la nostalgie d’un passé récent glorieux. Les rénovations de Gabi ou Torres, plus qu’émoussés mais légendes du club et personnage actif de la réussite récente, ainsi que le retour de Costa vont aussi en ce sens.

crédits : MundoDeportivo.com

Les rojiblancos semblent payer cette saison une politique de recrutement qui ne marche pas et une incapacité à faire des choix clairs. Ils laissent un sentiment mitigé à pas mal d’observateurs. En terme de points le contrat est rempli pour le Cholo. Solidement accroché à cette deuxième place malgré cette interdiction de recrutement, ils tiennent le cap. Mais sur le terrain l’Atleti est moins dominateur, perd plus de duels. Les joueurs semblent aussi plus à la merci de leurs adversaires. Cependant ce sentiment d’un Atleti sur le fil les avantages aussi, les adversaires laissant plus d’espaces dans leur dos ce qui permet aux hommes du Cholo de s’amuser en contre.

On le sait, pour perdurer au plus haut niveau il faut se renouveler sans cesse, sous peine de devenir prévisibles et d’entrer dans une routine destructrice. On se gardera de parler de fin de cycle pour les hommes du Cholo mais il va falloir s’activer cet été sous peine de voir les Colchoneros retomber dans leurs travers. L’Atleti n’est pas encore un très grand club, attention à la chute.

Benjamin Bruchet

@BenjaminB_13

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